Le Prénom, cette pièce désormais célèbre et largement diffusée grâce au film français qui en a été tiré, est ici adaptée au Québec, et cela ajoute encore à son humour. Dans un superbe décor, les cinq artistes déploient un très grand talent pour faire rire le public du début jusqu’à la fin du spectacle.
Un bel appartement rempli de livres dans deux grandes bibliothèques: nous sommes chez Pierre et Zabou, qui forment une famille aimante avec leurs deux enfants. Pierre est professeur à McGill, Zabou enseigne dans une école secondaire. Ce soir, ils reçoivent leurs plus proches amis pour le souper. Il y aura Claude, un musicien professionnel; Vincent, qui travaille dans l’immobilier, et Anna, sa jeune conjointe enceinte, qui aura un peu de retard.
À l’exception d’Anna, qui a rejoint le groupe depuis relativement peu de temps, toutes ces personnes se connaissent et s’apprécient depuis fort longtemps. Les relations prennent racine dans la jeune adolescence. Vincent qui est depuis toujours le meilleur ami de Pierre est aussi le frère de Zabou.
Quand leurs deux parents étaient vivants (Henry est décédé, mais Françoise est très proche de Zabou et de Pierre), ils recevaient Claude comme un troisième enfant. C’est dire à quel point les relations remontent à loin. Elles sont solides, pleines de beaux souvenirs communs et d’affection sincère.
Et pourtant… Dans des dialogues qui fusent et s’emballent progressivement, les blagues douteuses, les opinions sans grande portée, les révélations inutiles ou anodines en apparence, les petits secrets là où on croyait naïvement à la totale transparence, sont prononcés et produisent des ondes de choc successives et irrattrapables.
« Le mécanique plaqué sur du vivant », disait Bergson, est ce qui produit le rire. Ici, le mécanique provient d’une part de la croyance selon laquelle, parce qu’on s’aime depuis longtemps, il est possible de tout se dire. Et, d’autre part, de cette onde de petits agacements combinés aux narcissismes des protagonistes qui produit des catastrophes en cascades.
C’est désopilant. Le rire est irrésistible, et les références québécoises tout à fait délicieuses.
Le Prénom est une belle comédie à voir pendant le temps des Fêtes, pour se détendre un peu. La distribution est excellente et l’action parfaitement menée, autant dans les dialogues que dans la gestuelle.
C’est drôle, bon enfant. Et il est tellement savoureux d’assister à ce genre de scènes et de batailles sans avoir à y participer et à devoir s’y embourber à ses dépens et à ceux des autres.
Le Prénom
Texte : de Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière
Adaptation : Maryse Warda
Mise en scène : Serge Denoncourt
Direction artistique : Pierre Bernard
Interprétation : Mikhaïl Ahooja, Benoit Drouin-Germain, François-Xavier Dufour, Karine Gonthier-Hyndman et Noémie O’Farrell
Une production : Agents Doubles productions inc.
Le Prénom du 4 au 15 décembre 2024 chez Duceppe, à Montréal