Un pareil titre semble sous-entendre une prise de risque, un défi, une aventure incertaine. On peut dire que c’est ce à quoi s’est livré Rafael Payare avec l’Orchestre symphonique de Montréal, le 25 octobre dernier, à la Maison symphonique.
Sous prétexte de réunir des représentants des deux écoles de Vienne, Payare a choisi de présenter une symphonie de Mozart (no. 35 en ré majeur), le concerto pour violon de Beethoven, un arrangement de l’Offrande musicale de Johann Sebastian Bach et, voilà le risque : Passacaille op.1 d’Anton Webern. Si la musicologie nous enseigne le sens et la valeur d’une telle œuvre, il n’en demeure pas moins que pour plusieurs d’entre nous, elle peut apparaître comme une cacophonie organisée et bruyante.
Personnellement, j’admire les musiciens qui se colletaillent un exercice technique aussi exigeant, mais ça ne me donne pas envie de passer l’œuvre en boucle dans ma liste d’écoute.
Mais revenons à l’arrangement très particulier réalisé par Webern avec l’Offrande musicale qui nous a permis de constater un point qui semble commun aux deux compositeurs : la capacité de créer une musique aussi belle qu’elle est intellectuelle. Cette étonnante partition apparaît découpée de manière chirurgicale et on pourrait penser qu’il s’agit d’un dépeçage. Mais à bien y regarder, on s’aperçoit qu’il s’agit plutôt d’un savant assemblage qui allie grâce et sévérité.
Concernant le Mozart, le choix de tempo que fait Payare est très conventionnel et c’est bien ainsi. Ce qui est moins habituel, ce sont les contrastes et l’intensité. L’OSM a joué Mozart comme on joue habituellement Beethoven et, croyez-moi, c’est un compliment. C’était tout à fait rafraîchissant d’être surpris par des forte joués fortissimo sans pour autant que le public soit assourdi.
Si le Mozart a été interprété comme du Beethoven, le Beethoven aussi, en tout respect du format du concerto, c’est-à-dire que l’orchestre de pleine dimension tente de se faire tout petit et finit par se faire passer pour un orchestre de chambre, laissant ainsi toute la place au soliste. Le soliste en question, Andrew Wan, violon solo de l’OSM, a saisi l’occasion de montrer toute sa technique et sa virtuosité en interprétant le seul, mais néanmoins difficile concerto pour violon du grand Ludwig. Il a bien fait, mais nous aurions apprécié plus d’émotion, plus de tempérament, plus de Beethoven, quoi.
La direction de Payare était expressive, délicate, colorée et exubérante, mais jamais prétentieuse.