Au lieu d’ignorer la fascination des plus jeunes pour le macabre et le surnaturel, La courte échelle a lancé la Collection Noire, une série d’horreur convenant aux ados, dont la plus récente parution est Baie-des-Corbeaux, un roman d’épouvante signé Sonia Sarfati.
Connue pour ses longues années de service dans les pages culturelles de La Presse, Sonia Sarfati est également l’auteure d’une quarantaine d’albums et de romans jeunesse, et s’est même vue décerner le Prix Littéraire du Gouverneur général en 1995 pour son livre Comme une peau de chagrin. Les garçons de onze ans et plus s’identifieront immédiatement aux deux héros de Baie-des-Corbeaux, son plus récent roman, puisque l’auteure puise dans sa propre expérience de mère pour décrire avec beaucoup de justesse la réalité des adolescents d’aujourd’hui.
Pour les vacances estivales, la mère de Théo a loué une vieille maison de campagne dans le village de Baie-des-Corbeaux. Afin qu’il ne se sente pas trop désœuvré, elle a aussi invité son cousin Nicolas à passer l’été avec eux. Puisque l’Internet est « super lent » dans ce coin perdu de campagne, les deux ados se lancent à l’exploration, et découvrent dans le grenier une série de toiles, toutes plus lugubres les unes que les autres. Lorsque des cognements et des grattements se font entendre derrière l’un des tableaux représentant une porte rouge, les deux jeunes seront confrontés à une terrible malédiction pesant sur l’endroit depuis plusieurs générations…
À quoi ressemble de l’horreur jeunesse? En terme d’intrigue, avec son histoire de tableau maudit et ses références à The Shining ou The Blair Witch Project, Baie-des-Corbeaux s’avère assez captivant pour des adultes. La plume de Sonia Sarfati va droit au but, sans trop perdre de temps dans de longues descriptions ou les états d’âmes des personnages. Tout en étant bien écrit, le langage n’y est pas aussi soutenu que dans un roman pour adultes (quoiqu’on retrouve quand même le mot « dubitatif » dans le texte), et l’auteure n’appuie pas trop sur le côté dégueulasse ou violent du récit.
Pour éviter que les jeunes ne soient intimidés par un roman aux pages noircies de caractères, la composition graphique de Baie-des-Corbeaux est très aérée. Chaque page contient somme toute assez peu de mots, ce qui ne risque pas de rebuter les jeunes. Une trentaine d’illustrations en noir et blanc signées Jared Karnas (le fils de Sonia Sarfati) agrémentent la lecture du texte en mettant en image certains détails du récit, et chaque chapitre est décoré d’un cadre différent dessiné à la main, une autre belle touche visuelle qui augmente l’attrait du livre.
En proposant de l’horreur de qualité faite sur mesure pour eux, Baie-des-Corbeaux ne fera pas seulement frissonner les ados : il risque surtout de leur donner le goût de la lecture, ce qu’on ne peut qu’applaudir.
Baie-des-Corbeaux, de Sonia Sarfati avec illustrations de Jared Karnas. Publié aux éditions La courte échelle; 242 pages.
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