La tâche ne semble pas si titanesque: au dire de nouveaux travaux de recherche effectués notamment au sein de l’Imperial College, à Londres, protéger ne serait-ce que 0,7% des surfaces émergées de notre planète pourrait aider à préserver les habitats du tiers des espèces de quadrupèdes menacées et uniques.
L’étude en question, publiée dans Nature Communications, révèle que de vastes gains en matière de conservation animale sont possibles en se concentrant sur les régions abritant une biodiversité exceptionnelle, ainsi que sur les espèces possédant les caractéristiques les plus distinctes, sur le plan de l’évolution, mais aussi celles qui sont le plus menacées.
Parmi ces espèces menacées, on trouve des animaux comme l’aye-aye, un lémur vivant sur l’île de Madagascar; le fort distinct messager sagittaire (un oiseau à très longues pattes possédant une coiffe particulière); l’amphibien Nasikabatrachus sahyadrensis, dont le nez ressemble à la truffe d’un cochon, et le gavial du Gange, un crocodile au museau long et étroit vivant sur le sous-continent indien.
En ce moment, cependant, seulement 20% des lieux identifiés dans l’étude font l’objet d’une forme de protection ou d’une autre, la plupart des régions étant sous pression constante et croissante de la part des humains.
Au dire du principal auteur de l’étude, Sebastian Pipins, « les travaux mettent de l’avant les zones de la planète qui suscitent une inquiétude immédiate. De plus, cela démontre qu’en ne protégeant qu’une fraction de la surface terrestre, de gigantesques gains peuvent être accomplis en matière de conservation de la nature. »
À risque d’extinction
Le projet a ainsi permis d’identifier des zones d’intérêt, en matière de conservation, où l’on trouve une concentration particulièrement importante d’espèces distinctes, sur le plan de l’évolution, et qui sont aussi menacées.
Pour M. Pipins, « il est important de ne pas seulement tenir compte de la diversité des espèces, lorsqu’il est question des efforts de conservation, mais aussi de l’histoire de cette diversité en termes d’évolution, pour s’assurer que des branches importantes et uniques du vivant ne soient pas perdues ».
Les chercheurs ont ainsi cartographié la distribution géographique de quelque 3000 espèces uniques et menacées, dans un ensemble de 25 zones où les efforts de conservation auraient l’impact le plus important.
Parmi ces zones, on trouve de vastes pans de l’Asie du Sud-Est et de la plaine du Gange, en Inde; le bassin de l’Amazone, ainsi que les terres hautes du Cameroon, ou encore les montagnes de l’Afrique de l’Est.
Les auteurs de l’étude ont détecté la richesse la plus importante dans une zone de moins de 100 kilomètres carrés à Madagascar. Ce pays, avec le Mexique et l’Indonésie, compte le plus grand nombre d’espèces à la fois diverses et menacées.
Et comme s’il était nécessaire de souligner encore plus l’urgence de la situation, les travaux de recherche ont mis au jour le fait que les trois quarts de ces espèces vivent dans un seul pays.
Facteurs humains
Par ailleurs, non seulement ces populations d’espèces sont-elles sous pression, en raison des activités humaines, les individus vivant dans ces régions, et qui côtoient donc ces animaux, sont aussi aux prises avec des conditions de vie plus difficile, un accès réduit à l’éducation, et des perspectives économiques réduites.
Pour le Dr Rikki Gumbs, « nous sommes présentement en pleine crise de la biodiversité, une crise qui est alimentée par l’utilisation insoutenable des ressources naturelles; cela est choquant, mais pas surprenant, de constater que 80% des zones que nous avons identifiées sont sous très forte pression des suites de l’activité humaine ».
Et en raison de ces enjeux, les ressources limitées des gouvernements sont souvent consacrées à aider les humains, plutôt qu’à financer la conservation.