C’est tout de rouge vêtue, robe seyante aux libres volants que la chanteuse s’est offerte lors de l’ouverture du Festival international de littérature. Incarnant la poésie sensuelle épicurienne d’Alice Mendelson – phénoménale poétesse de plus de 90 ans, camarade de son père, Ringer occupe tout l’espace en virevoltant d’extase, telle une gamine.
Avec discipline et désinvolture, la lectrice déverse la prose avec une articulation sans bémol. Chaque poème se termine par une date de conception, des années 40 jusqu’à l’ère actuelle. Preuve que le désir de vibrer ne s’estompe jamais, se transformant au gré du temps, même en solitaire compagnie des souvenirs du plaisir que la vieillesse ne peut arracher aux sens.
Le chant et la voix de Catherine Ringer toute en texture coïte à l’exercice soutenu de la lecture, sur ce ton espiègle rappelant les années Rita Mitsouko. Le public, suspendu à ses lèvres et à sa gestuelle de mouvements de bras et de jambes maîtrisés, se laisse emporter par la fougue d’une artiste de 65 ans chaussée d’élégance et de majesté. Son acolyte le pianiste Grégoire Hetzel enchante par son jeu virtuose, allant même à l’extravagant usage d’un petit synthétiseur sur lequel Catherine Ringer jette ses doigts en guise de point d’exclamation. Car l’Érotisme de vivre titille les sensations de l’intime, de l’inavouable, à fleur de peau et à fond de chair.
Au terme de la performance, Catherine Ringer délivre encore deux pépites de sa gorge vive, inextinguible : Un jour tu verras de Mouloudji et Je me suis fait tout petit de Brassens. Le désir de la garder tout près de nous, encore et encore, planait comme un parfum d’ivresse.
L’Érotisme de vivre
95 ans et toute une vie avant
Catherine Ringer + Alice Mendelson