Après la mort de son mari, Harper Marlowe décide de prendre du temps pour elle dans un petit village anglais, loin de Londres, histoire de se ressourcer. Mais le village en question la forcera à confronter l’inimaginable…
Réalisé et scénarisé par Alex Garland, qui était aussi à la barre du fantastique Annihilation, ainsi que d’Ex Machina, en plus d’avoir scénarisé et produit l’incroyable Dredd, Men ne surprendra personne en étant distribué sous la bannière A24. Bien connue pour ses propositions à tout le moins différentes, si ce n’est bien souvent franchement perturbantes – bonjour Midsommar, notamment, mais aussi le très réussi Everything Everywhere All At Once –, la compagnie, avec sa bande-annonce pour Men, laissait présager d’un long-métrage intriguant et déstabilisant.
Dans ce petit village anglais, donc, la jeune femme en deuil est confrontée à toute une série de personnages parfois sympathiques, mais surtout souvent désagréables, voire agressifs. Et le fait que tous les personnages masculins soient interprétés par Rory Kinnear, bien connu pour son travail au théâtre, mais aussi à la télévision et au cinéma (dans les James Bond de l’ère Daniel Craig, entre autres), n’aide pas à rassurer le cinéphile.
Pourquoi s’agit-il toujours du même acteur? Où sont les femmes, dans ce village reculé? Pourquoi un homme étrange, nu et couvert de mousse, poursuit-il Harper? Et pourquoi les appels vidéo entre cette dernière et son amie restée à Londres sont-ils souvent interrompus par des images de personnes qui hurlent, avant d’être coupés?
On ne pourra certainement pas reprocher à M. Garland de créer une ambiance facilitant le malaise et l’inconfort. L’actrice principale, excellente Jessie Buckley, que l’on a pu voir dans Chernobyl, notamment, a beau se trouver dans un endroit qui devrait être idyllique, il n’en reste pas moins que l’utilisation des jeux de lumière, notamment, permet rapidement de laisser planer le doute. Qu’est-ce qui rôde, dans ce sombre tunnel abandonné? Quelle présence nous pousse-t-elle à regarder derrière notre épaule en rentrant chez soi, le soir?
À l’instar de bien d’autres films d’A24, la symbolique occupe ici une place prépondérante, et vers la moitié du film, environ, le déroulement relativement « normal » du scénario prend une tangente particulièrement imagée et surnaturelle. À un point tel, en fait, que vers la fin du film, on se grattera un peu la tête en essayant de comprendre ce qui est en train de se passer.
Il ne faut pas se leurrer : Men est un film doté d’une distribution franchement solide, et on reste scotché à son écran jusqu’à la fin, ne serait-ce que pour en connaître l’ultime dénouement.
Le problème… Le problème, eh bien, c’est que Men n’est pas en mesure de demeurer sur la mince ligne entre le fait de trop prendre le spectateur par la main, et l’erreur consistant à fournir trop peu de détails. S’il est nécessaire de consulter un site web pour comprendre la fin du film, suite au visionnement, c’est qu’il y a un problème. Non pas que le long-métrage soit excessivement obscur, mais disons qu’il est suffisamment flou pour donner l’impression que l’on brode un peu sur du vide.
Cela ne fait pas de Men un mauvais film, loin de là. Mais cela n’en fait pas un bon film, non plus, malgré toutes ses qualités.