Vous vous êtes déjà dit « j’aimerais être le maire de cette ville qui se fait démolir comme si elle était le Canadien de Montréal » en regardant un film de Godzilla ou encore de King Kong? Non seulement Pieuvre.ca ne vous juge pas, mais on vous offre même le moyen de réaliser ce désir pour le moins spécifique : Kaiju Wars.
Jeu de stratégie au tour par tour aux influences artistiques résolument rétro et au ton parodique assumé, Kaiju Wars est l’oeuvre du petit studio saskatchewanais Foolish Mortals dont le fondateur et principal programmeur, Michael Long, se présente comme un créateur de jeux innovants.
Cette affirmation somme toute audacieuse n’est pas sans preuve. Son précédent bébé, Radio General (sorti en 2020), a su exploiter le contrôle vocal à bon escient dans le cadre d’un jeu de guerre historico-stratégique plongeant le joueur dans la peau d’un général commandant son armée depuis le confort de sa tante. Radio General, bien que niché, s’était attiré des éloges pour son originalité tout en se méritant un accueil « très positif » sur Steam, la plateforme où il est distribué.
Kaiju Wars (également offert exclusivement sur Steam) a davantage des airs de plaisir coupable. Ceux d’une lettre d’amour à un genre cinématographique où le ridicule ne tue pas, contrairement aux lézards géants.
L’ensemble, faute d’être aussi novateur que Radio General, bénéficie avant tout d’une direction artistique réussie. La trame sonore créée par Kent Weiler, le « DJ » de Foolish Mortals, mise beaucoup sur des sonorités électroniques rappelant la musique de Magic Sword et accompagne plus qu’efficacement le pixel art de Keenan Cloutier, à la fois simple et savant dans son recours à trois couleurs principales : le jaune, le rose et le mauve. Pas de réalisme détaillé, ici, mais plutôt une légèreté éclatée, très évocatrice des années 80, qui se marie à merveille avec l’absurdité d’une histoire de monstres géants habitant la Terre depuis des millions d’années, dans le plus grand secret, avant de soudainement s’attaquer à une mégalopole.
Le joueur incarne un dirigeant municipal. Fraîchement élu maire de TikTokyo, il visite une base militaire au moment où un premier monstre géant décide qu’il est temps de tout casser. Une occasion parfaite pour un tutoriel où on apprend entre autres que les Kaijus attaquent (presque) toujours le bâtiment le plus proche.
S’ensuit une campagne d’une soixantaine de missions où vous tenterez de repousser ces monstrueuses créatures, qu’on vous laissera d’ailleurs le loisir de baptiser, avec l’aide de militaires, mais aussi de scientifiques, comme dans tout bon film de Kaiju.
Au fil des missions, chars et avions de chasse seront envoyés au casse-pipe pour terrasser vos puissants ennemis, ou du moins pour les ralentir et vous donner le temps de produire des avancées scientifiques capables de les faire battre en retraite. Mais ce ne sera pas toujours suffisant. Il vous faudra aussi recourir à des unités spéciales, à l’exemple d’un mecha, ou encore à la construction de bâtiments sacrificiels pour attirer les bestioles loin de cibles stratégiques.
Du fil à retordre
Kaiju Wars n’est d’ailleurs pas particulièrement facile. Évaluez mal vos priorités et l’échec deviendra rapidement difficile à éviter, donnant à certaines missions des allures de puzzle à la solution un peu trop spécifique.
Mais Kaiju Wars a plus souvent des airs de jeu de table. Chose peu surprenante quand on s’attarde à un autre de ses créateurs, Jeffrey Long, que Foolish Mortals présente comme un passionné possédant assez de jeux du genre pour ouvrir son propre café de jeux de société.
L’expérience est légèrement redondante dans ses principes, bien que certaines mécaniques permettent d’éviter que la lassitude ne s’impose trop rapidement.
S’inspirant de nombreux classiques du genre, Kaiju Wars utilise par exemple des cartes de projet, pigées au début de chaque tour dans une pile de cartes sélectionnées avant la mission. Ces cartes procurent des avantages variés. Trois cartes sont pigées à chaque tour, mais il n’est possible d’en utiliser qu’une. Un choix qui s’avère parfois crucial et qui apporte de l’imprévisibilité stratégique.
Les tours se déroulent en trois étapes : une étape économique (certains bâtiments générant de l’argent ou des points de science), une étape militaire (votre tour actif) et une étape consacrée aux monstres, qui poursuivent leur avancée destructrice. Et pendant que les monstres s’activent, des ennemis tapis dans l’ombre le font également, utilisant leurs propres cartes de projet pour fournir des avantages aux Kaijus.
Qui sont ces ennemis? C’est là une des questions à explorer dans la campagne, qu’on vous laissera découvrir. Ce qu’on peut toutefois dire sans vendre la mèche, c’est que cette campagne est présentée avec un mélange de gravité dramatique sur le fond et d’humour parodique relativement bien dosé, bien qu’inégal et sombrant à l’occasion dans la facilité.
Un humour qu’il faudra malheureusement apprécier en anglais, à moins de ne pas se formaliser d’une traduction très inégale, donnant parfois l’impression d’avoir été produite avec une version ancestrale de Babel Fish.
Dans l’ensemble, l’expérience est divertissante, faute d’être révolutionnaire ou de tenir en haleine au point d’en oublier le cours du temps. Kaiju Wars devrait plaire aux amateurs de jeux de tables et de jeux tactiques au tour par tour, ou tout simplement aux fans d’ambiance néon et de monstres géants.
Kaiju Wars
Développeur: Foolish Mortals Games
Éditeur: Foolish Mortals Games
Plateforme: MacOS et Windows (testé sur Windows / Steam)
Offert en français