C’est avec une création audacieuse d’Olivier Arteau que le théâtre Denise-Pelletier ouvre sa saison 2017-2018. Dans une langue crue, violente et cynique, le Théâtre Kata nous présente Doggy dans gravel, pièce qui ne peut laisser personne indifférent.
Olivier Arteau nous trace le portrait plus grand que nature d’une génération internet désirant passer (trop vite?) vers l’âge adulte. Le tout enrobé d’une toile de fond digne d’un vidéoclip de notre popstar américaine préférée diffusé sur MusiquePlus.
Dans le but de frencher, de devenir quelqu’un et de s’émanciper sexuellement, cinq scouts décident de se rendre à un après-bal dans un champ de blé d’Inde de St-Polycarpe. Ils vont à la rencontre d’un trio d’adolescentes complètement obsédées par le désir de plaire et d’être sexy. Tous ensemble, ils tomberont dans les folies de tous les excès à la recherche d’un conformisme social. L’antihéros, Maverick, poursuit sa quête dans la gravité d’en finir avec sa virginité. Ayant passé la journée à regarder des vidéos pornographiques et de viols sur YouTube, Maverick se retrouve désorienté entre le désir d’aimer et la culture du viol. Il est bouleversé par cette surconsommation d’images. Cette confusion se rattache à la facilité de trouver l’information sur l’internet. En un seul clic, n’importe qui peut se retrouver face à de la pornographie, un viol, un suicide en direct, des assassinats ou autres monstruosités du genre. Les adolescents croient tout connaître concernant le sexe en général. Ils ont tout vu, mais ils n’ont rien vécu.
Olivier Arteau, auteur et metteur en scène de la pièce, a su implanter l’influence de la culture populaire sur la génération Y par ses enchaînements de mouvement aux allures des vidéoclips pop américains des années 2000 et par le désir des jeunes femmes à vouloir calquer le sex-appeal de leurs vedettes favorites. La mise en scène peut se résumer par une longue mise en place chorégraphiée et de tableaux dansés très rythmés où l’on ne peut qu’admirer la précision et la virtuosité des comédiens. On peut dire qu’on nous garroche les propos en pleine face.
On ne peut passer à côté de la grandeur et le grotesque des personnages. Aucune subtilité n’est de mise, autant pour les maquillages exagérés que pour le jeu démesuré et qui va au-delà du stéréotype. Mentions spéciales à Ariel Charest interprétant avec cran et intelligence Kimberly Gravel, une bimbo blanche à deux cennes, et à Vincent Roy qui nous mitraille, brillamment, un rap qui prouve sans nul doute que la musique pop d’aujourd’hui est vide de sens et axée sur la sexualité. Chaque personnage est présenté avec une certaine autodérision qui entraîne des moments forts, vacillant entre le malaise et le rire, ainsi qu’une critique claire et nette sur la génération Y.
Olivier Arteau est diplômé du Conservatoire d’art dramatique de Québec depuis 2016. Il obtient en 2014 le prix du Centre des auteurs dramatiques (CEAD) pour l’auteur le plus prometteur avec sa pièce Le Monstre. Doggy dans gravel est sa première œuvre publiée, mais certainement pas la dernière.
Courez vite voir Doggy dans Gravel, du 29 août au 16 septembre 2017, au Théâtre Denise-Pelletier, salle Fred Barry, à Montréal.