Les Contes pour tous ont bercé bien des jeunesses et difficile d’en trouver un plus emblématique que la fameuse Guerre des tuques avec ses répliques bonbons et son cœur d’enfant qui réchauffe toutes les maisonnées à coup sûr. Il est donc désolant de voir ce classique prendre un virage inquiétant dans cette relecture créée dans le but de faire connaître cette œuvre marquante à un nouveau public tout jeune.
À l’instar de la bande à Charlie Brown il y a une semaine, La Guerre des tuques se voit gonflée en trois dimensions autant dans ses graphiques que dans son format cinématographique (fortement inutile admettons-le). Et les similitudes peuvent beaucoup s’y retrouver dans cet univers dominé par la naïveté de ces enfants qui s’amusent sans la moindre présence de parents.
Le charme toutefois n’est que rarement au rendez-vous, si ce n’est du running gag sympathique de Daniel Blanchette de Victoriaville. Si l’histoire de base a été conservée tout comme quelques répliques cultes, on a éliminé l’essence même de la chose pour en faire un produit générique qui s’écoute difficilement tellement ses personnages ne parviennent pas à conserver notre attention et ses situations à nous garder concentrés. La petite Lucie est particulièrement désagréable et rapidement agaçante, n’en déplaise à la charmante Sophie Cadieux qui en fait la voix.
La distribution est à ce titre un peu troublante. Bien sûr, on a réuni de gros noms, mais c’est étrange d’avoir confié autant de voix masculine à des femmes, que ce soit Anne Casabonne, Hélène Bourgeois-Leclerc ou même Catherine Trudeau. Si l’effort passe majoritairement bien si l’on n’y pense pas trop, c’est commun comme technique après tout, il est plus plaisant d’y reconnaître Gildor Roy ou André Sauvé en écho dans le double-rôle des jumeaux Henri et Georges.
Visuellement, les graphismes sont limités. Difficile de comparer l’ensemble aux grandes productions américaines et le coup de crayon est loin d’être délicat. Il faut néanmoins admettre que le fort de neige en question est une splendeur. Il est ingénieux et fait grandement rêver et vaut pratiquement à lui seul le visionnement, n’en déplaise à la trame sonore qui, malgré ses participations imposantes s’avère plus plaquée que nécessairement agréable.
Si les vocalises de Céline Dion laissent peu de place à Fred Pellerin et que Jonathan Painchaud vient brusquer les douces compositions de son frère Éloi et de Jorane, on préfère l’union toujours merveilleuse de Marie-Pierre Arthur à Louis-Jean Cormier que l’enthousiaste un peu trop forcé de Marie-Mai. Il faut aussi admettre que ces participations sont rapidement éclipsées par l’écriture trop simple des paroles qui viennent enlever encore plus de subtilité à l’ensemble d’une simplicité trop souvent aberrante.
Après tout, le nombre réduit de personnages et le manque de véritables enjeux n’aident pas à accorder de la profondeur à ce long-métrage qui n’a ironiquement pas beaucoup de dimension dans le sens concret de la chose.
Alors qu’on annonce une suite et une télésérie à tout cela, on a de quoi s’inquiéter de l’esprit franchise qu’on veut soutirer d’un des plus beaux piliers de notre cinématographie. On espère que cet effort poussera davantage de générations à s’unir pour se retourner vers l’original qui s’avère encore aujourd’hui imbattable, peu importe la forme des balles de neige qu’on aura beau vouloir lancer.
4/10
La Guerre des Tuques 3D a vu sa sortie devancée d’une journée et prend l’affiche en salles ce jeudi 12 novembre