Présentée en primeur lors du Festival TransAmériques 2009, la pièce Douleur Exquise, nous présente en 35 saveurs le court récit d’une rupture aux détails aussi brefs qu’inhabituels. Adaptation du livre du même nom de l’auteur Sophie Calle, cette pièce se veut à notre avis le point fort de la saison 2009-2010 du Théâtre de Quat’Sous.
Il y a donc cette femme – femme dont on ignorera le nom tout au long de l’histoire – qui nous raconte en boucle d’une dizaine de phrases l’essentiel de sa récente séparation. Les faits changent à peine:
M., cet homme dont elle tombe amoureuse.
Un départ précipité pour vivre un stage de trois mois au Japon.
Un rendez-vous manqué à New Delhi au terme de 92 jours d’expatriation.
Une note l’attend: M. a eu un accident, contacter Bob (Le père, médecin et finalement ami de M.).
Une dizaine d’heures pour obtenir la communication dans une chambre miteuse de l’hôtel Impérial.
M. s’est présenté à l’hôpital, pour une écharde au doigt..
Un coup de téléphone, il aurait voulu tout lui expliquer. Pas de chance. Elle devine qu’il aime une autre femme, c’est donc fini.
Le tout est donc joué 35 fois. Parfois sur un ton triste, parfois en dansant sur scène comme si elle était dans un bar, parfois se pinçant la peau jusqu’à nous en donner des douleurs sur notre siège, Anne-Marie Cadieux interprète le personnage avec une énergie hors du commun.
Le tout est si différent d’une fois à l’autre que l’effet de répétition disparaît. Après la pièce on me fait part d’un rapprochement avec les compositions de Philip Glass. J’acquiesce. Le jeu est juste, fluide et bien pondéré grâce aux quatre « mini-interventions-faits-vécus » sur le thème de la douleur et de la déchirure (Pierre-Antoine Lasnier, Ginette Morin, Gaétan Nadeau et Paul Savoie). Interventions nécessaires au rythme de la pièce, elles ne sauront pas marquer le spectateur, si ce n’est que du passage où le personnage joué par Paul Savoie nous fait part de l’absence de souffrance dans son parcours et du désir de vivre une telle douleur afin que son histoire débute enfin. Un point de vue différent qui porte à réflexion, comme si, oui, souffrir de temps à autre, ça devait faire du bien.
L’adaptation ainsi que la mise en scène de Brigitte Haentjens convient parfaitement au ton ironique du texte et nous surprend par son audace. On pense ici à l’utilisation d’un micro tendu vers le public à quelques reprises ou à la gestuelle d’Anne-Marie Cadieux.
Pieuvre.ca vous recommande fortement la pièce, une bonne occasion de se divertir.
Douleur Exquise, au Théâtre de Quat’Sous jusqu’au 15 mai 2010.