Sorti à peine deux ans après la parution de l’excellent roman d’espionnage du même nom, écrit par feu le maître, John Le Carré, The Spy Who Came In from the Cold est l’exemple type du film qui ne se fait presque plus, aujourd’hui.
Quand on pense à espionnage, de nos jours, on pense effectivement à James Bond, ou encore à Mission: Impossible… À des hommes séduisants, pistolet au poing, qui vont de poursuite en explosion, sans jamais vraiment s’arrêter. En 1965, cette adaptation du livre sorti en 1963 tranchait déjà avec le premier James Bond, sorti un an auparavant. Car dans cette bataille des esprits, il n’y a ni explosion, ni fusillade…
Non, la guerre est bel et bien froide, même si Alec Leamas (un Richard Burton tout en profondeur) a plusieurs fois constaté le côté tout à fait violent de cet affrontement idéologique entre l’Ouest et l’Est, y compris lorsqu’un agent travaillant pour les Britanniques se fait abattre au moment où il allait franchir Checkpoint Charlie, l’un des points de passage entre Berlin-Est et Berlin-Ouest, à l’époque du mur.
C’est d’ailleurs dans la foulée de la mort de cet agent que Leamas semble subir un choc nerveux; désillusionné, il affirme vouloir quitter les services secrets, et sera approché par l’autre camp, celui de l’URSS, afin de faire défection. Mais est-ce une véritable défection, ou alors un plan machiavélique pour débusquer un traître chez les Soviétiques? Ou s’agit-il encore d’un stratagème encore plus complexe, planifié avec plusieurs coups d’avance, et selon plusieurs revirements de situation, pour plutôt protéger un agent Britannique bien installé chez les Russes?
Tout au long du film, un film tourné en noir et blanc, presque présenté sans aucune musique, on se demandera qui est le véritable traître, qui ment pour sauver sa peau, ou encore qui est si convaincu par la justesse des arguments de son camp qu’il ira jusqu’à tuer (ou mourir) pour la cause.
Oui, le long-métrage est un peu lent; mais c’est dans cette lenteur que l’on peut détecter ce qui fait de cette oeuvre un grand film: sans artifices, sans fioritures, on nous présente une fascinante histoire d’espionnage, de mensonge et de manipulation qui, en soit, représente tout à fait son époque. Une époque faite de zones de gris, d’incertitudes, alors que le mur vient d’être construit par les Soviétiques et que les tensions sont particulièrement vives. Sans qu’il ne soit permis d’en douter un seul instant, The Spy Who Came In from the Cold est un classique du septième art.