Dénué de tout humour ou presque et par le fait même du peu de plaisir que contenait le film devenu franchise sans fin – si l’on oublie les moments d’un ridicule exacerbé difficile à pleinement assumer – ce quatrième et interminable chapitre de John Wick étire cette chasse à l’homme jusqu’à un ennui qui n’est même plus palpable, tellement il a été épuisé jusqu’à la moelle. À 169 minutes, ça devient difficile à pardonner.
Souffrant de marketing foireux et discutable, ce film qui fait suite à la « fin » qui ô surprise n’en était pas une, mais bien le début d’un « univers », vient surfer sur un succès plutôt que de l’approfondir.
Au mieux, même si on nous sort toujours plus de connaissances sorties de nulle part, toutes interprétées par des acteurs aisément interchangeables, on réduit quand même le nombre de personnages pour se concentrer sur un microcosme qui rend l’histoire un brin plus simple à suivre.
Au pire, on ne se donne pas vraiment plus le loisir de doter ces êtres d’histoires, de motivations ou de caractéristiques valables au-delà de la simple idée. Un scandale compte tenu de la durée du film, d’ailleurs.
Exit le bref désir d’incorporer quelques personnages féminins au tonus bien accueilli, ici on se demande ce qui ferait le plus cool sur papier. Pourquoi pas un aveugle? Et pourquoi pas, comme toujours, des hommes qui feraient tout pour protéger leurs fragiles petites filles?
Même en méditant sur son existence, John veut être immortalisé comme un mari aimant, sa destinée se résumant au fait d’avoir aimé une femme, souvenir lointain qu’on veut nous faire avaler comme seule raison valable de vivre.
C’est que voilà, ce nouvel opus est d’un sérieux accablant. John court depuis plus de trois films déjà et il en a un peu assez. Il veut tuer tout ce qui bouge, mais il y a toujours de nouveaux ennemis plus puissants qui se mettent sur son chemin. Pas de chance!
Il y a bien le savoureux Ian McShane qui fait de son mieux pour s’amuser, ou en retrait Laurence Fishburne, qui fait semblant d’apprécier son rôle de faire-valoir limité, mais rien n’y fait, le sérieux est le mot d’ordre et même les rares répliques pince-sans-rire que doit déblatérer Keanu Reeves sont d’une sévérité assommante.
Si l’on garde les règles hiérarchiques de tout cet organigramme au plus simple, il n’en demeure pas moins que les deux premiers tiers ressemblent vachement à un jeu vidéo qui nous empêche de passer outre les longues séquences explicatives avant de finalement pouvoir jouer. Sans saveur ou même d’un semblant de style et profitant à peine des lieux ou des possibilités, les tableaux se succèdent dans des lieux aux limites de l’anonymat aux quatre coins du globe, n’aspirant même pas à un James Bond ou à un Mission : Impossible.
On comprend qu’on essaie de tout garder pour la finale explosive (provoquée de manière discutable d’ailleurs et à peine justifiable d’un point de vue scénaristique), mais ce n’est pas une raison pour nous garder au seuil du sommeil jusqu’à ce moment. Surtout que, comme plat de résistance, on se retrouve face à une succession de séquences d’action d’une traite qui s’avèrent rapidement répétitives et peu inspirées.
Les codes, l’honneur, le style… des paroles en l’air qui n’arrivent jamais à servir un film dont ses créateurs ont un manque total de vision. Qu’importe les détours en Orient, les scènes sont tout autant platement filmées que les autres, ne serait-ce que pour quelques néons plus colorés. Même une tentative de s’aider de musique pour ponctuer l’ensemble s’avère pitoyablement vaine. Pire, on sous-entend un désir de lorgner vers le western de manière peu claire, sans vraiment en connaître les différences et esquissant quelque chose qui serait tout autant du spaghetti ou du crépusculaire, en vain.
John Wick : Chapter 4 fait montre de tout ce qui va mal dans les idées de franchises, dans les sombres recoins du capitalisme et dans la notion d’étirer une sauce jusqu’à ce qu’elle ne lève plus. On suppose que les fans qui ont encensé chaque volet comme si c’était la plus impressionnante merveille du monde y trouveront encore son compte, mais en attendant, on espère quand même que le cinéma d’action ne se basera pas uniquement sur cette franchise pour se modeler.
4/10
John Wick : Chapter 4 prend l’affiche en salle le vendredi 24 mars.
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