Regenerator, le tout nouvel album du trio américain King Buffalo, est-il un disque de road trip? Il suffit d’entendre les premières mesures de la pièce titre pour se laisser embarquer à bord d’un improbable véhicule lancé à toute allure sur une tout aussi incroyable route… Préférablement un véhicule avec des décalcomanies de flammes sur les côtés, bien entendu.
Après Archeron, lancé l’an dernier, le groupe est de retour avec sept pièces au son à la fois toujours aussi lourd et planant. Et c’est franchement cette combinaison de groove et de profondeur des accords qui fait en sorte que Regenerator est un très, très bon album.
S’il ne faut peut-être pas y chercher une thématique, ou une série de thématiques, qui serait aussi solide que dans certains disques de King Gizzard and the Lizard Wizard – quoique les gars de l’Australie ne sont certainement pas exempts de critiques, eux non plus –, par exemple, King Buffalo choisit plutôt une autre approche : celle des longues chansons qui, en offrant toute la place à la musique, permettent d’entrer dans une sorte de deuxième univers.
Dans ce monde nouveau, la guitare nous emporte vers des cieux jusqu’alors inconnus, au moment même où le mélomane peut s’installer bien confortablement dans son siège et regarder défiler un paysage à la fois extraterrestre et familier.
En fait, King Buffalo réussit non seulement à nous transporter dans cet autre monde, mais parvient également à nous faire oublier notre propre réalité Du moins, le temps que l’album se termine avec la fantastique septième pièce, Firmament, et son très long solo de guitare électrique. Et c’est lorsque l’instrument s’apaise enfin, un peu plus de neuf minutes plus tard, que l’on émerge doucement de ce rêve éthéré, de cet univers où, selon les mots du chanteur, « nous ne faisions qu’un avec le ciel éternel ».
Regenerator n’est pas un album destiné aux impatients; il ne faut pas, non plus, se mettre en tête que l’on y trouvera des morceaux dansants, ou quelque chose de bref à se mettre sous la dent. Non, ce nouvel album de King Buffalo est une expérience, dans tous les sens du terme. Une expérience faite de guitares électriques, de couleurs vives, ou au contraire parfois étiolées, qui défilent de part et d’autre de notre esprit pour symboliser ce voyage que le trio nous propose d’effectuer avec eux. Et gare aux imprudents : le risque de s’égarer, quelque part entre deux accords, et de ne plus vouloir revenir à notre réalité, est grand. Et qui pourrait s’en plaindre, justement?