Près de 15 ans après la fin de l’émission diffusée sur HBO, le film The Many Saints of Newark propose une sorte d’antépisode qui explore la jeunesse de plusieurs personnages emblématiques de la série culte The Sopranos.
Prenant place à la fin des années 1960 et au début des années 1970, The Many Saints of Newark s’attarde principalement à l’ascension de Dickie Moltisanti (le père de Christopher, l’un des personnages récurrents de la série The Sopranos) au sein de la mafia du New Jersey, et à sa grande influence auprès de son neveu, un certain Tony Soprano, pour qui il deviendra une figure paternelle au moment où son propre père croupit en prison. S’appuyant sur les émeutes historiques ayant enflammé la ville de Newark en juillet 1967, qui se solderont par 16 morts et plus de 1500 blessés, le long-métrage relate le conflit opposant la mafia italienne, qui contrôle toutes les activités criminelles, aux Afro-Américains souhaitant obtenir leur part du gâteau. Avec en toile de fond la guerre du Vietnam et les tensions raciales, le scénario est assez décousu, et se rapproche davantage d’une chronique d’époque que d’une histoire de mafia en tant que telle.
C’est en présentant la vie quotidienne et presque banale des bonzes de la mafia que The Sopranos s’est démarquée des autres productions sur le même sujet. The Many Saints of Newark reprend sensiblement la même formule, mais dans une sauce rétro. Puisque le film est truffé de références à l’émission diffusée sur HBO entre 1999 et 2007, il s’adresse surtout à ceux et celles qui l’ont suivie. On retrouve plusieurs lieux familiers, comme la boucherie Satriale (dont l’enseigne n’est pas encore affadie par le passage du temps), le Vesuvio, et même un petit détour par le restaurant Holsten’s, où la toute dernière séquence de la série prend place. Le long-métrage va jusqu’à reproduire la scène où Johnny Soprano se fait arrêter par la police dans un parc d’amusement lors d’une partie de cartes illégale, et montre l’anecdote, seulement racontée au petit écran, où il fait feu dans la coiffure de sa femme, Livia.
Le plus grand plaisir de The Many Saints of Newark est de voir les versions jeunes des protagonistes des Sopranos, dont Pussy, Silvio, Paulie, Artie, Janice ou Carmela. Au-delà d’un travail de casting tellement réussi qu’on reconnaît sur le champ chaque personnage, les acteurs se sont manifestement inspirés de la performance des comédiens originaux pour imiter leur diction, et leur démarche. Affublée d’un nez en latex pour accentuer sa ressemblance avec Nancy Marchand (qui jouait le rôle dans la série télévisée), Vera Farmiga incarne Livia, et Jon Bernthal son mari, Johnny Soprano. Ray Liotta interprète les frères jumeaux Richard et Sally Moltisanti. Le choix de Corey Stoll pour camper Corrado, alias « Junior », est absolument parfait, mais le coup de génie du film est d’avoir embauché Michael Gandolfini, le fils de James, pour se glisser dans la peau d’un Tony Soprano adolescent, et incroyablement ressemblant.
Malgré la grande qualité visuelle de The Sopranos, la réalisation du cinéaste Alan Taylor (Thor: The Dark World, Terminator Genisys) est beaucoup plus léchée, et sa direction photo beaucoup plus artistique que celle de la série télévisée. En plus d’une superbe reconstitution d’époque, des voitures en passant par les costumes, The Many Saints of Newark utilise une colorisation qui donne une texture rétro à l’ensemble, évoquant les vieilles photos des années 1960. Les scènes d’émeutes dans les rues de Newark, alors que la Garde nationale est appelée en renfort pour tenter de stopper le chaos, comptent parmi les plus spectaculaires du long-métrage. L’émission contenait une trame sonore d’enfer, et le film continue la tradition, avec des succès de Neil Diamond, des Rolling Stones, de Stevie Wonder, de Dionne Warwick, du Steve Miller Band, des Jackson 5, de Van Morrison, ou des Everly Brothers.
En plus du long-métrage sur disque Blu-ray et d’un code pour télécharger une copie numérique, la version haute-définition de The Many Saints of Newark compte également quatre scènes retirées du montage, ainsi qu’un Making Of de treize minutes dans lequel le scénariste et créateur de la série David Chase explique les raisons l’ayant motivé à écrire ce prequel, et où les comédiens principaux parlent du contexte historique de l’intrigue et de l’héritage culturel laissé par les Sopranos. Une dernière revuette de cinq minutes revient sur l’importance de la famille dans cet univers, qu’il s’agisse des proches de Tony Soprano, des cinq familles mafieuses se partageant le territoire, ou du fait que Michael Gandolfini reprenne le flambeau et interprétant le personnage rendu célèbre par son père.
Loin de Goodfellas ou The Godfather, The Many Saint of Newark est un film de mafia assez banal qui apporte peu de nouveauté au genre, mais les amateurs des Sopranos seront heureux de plonger dans cette histoire, qui explique par la bande les origines de Tony Soprano.
6/10
The Many Saints of Newark
Réalisation: Alan Taylor
Scénario: David Chase et Lawrence Konner
Avec: Alessandro Nivola, Leslie Odom Jr., Jon Bernthal, Vera Farmiga, Corey Stoll, Ray Liotta et Michael Gandolfini
Durée: 120 minutes
Format : Blu-ray (+ copie numérique)
Langue : Anglais, français et espagnol