Elles arrivent par milliers: des familles de migrants originaires d’Amérique centrale, parfois même des enfants seuls. Leur but? Arriver aux États-Unis pour y trouver asile. Cette vague migratoire donne bien des maux de tête à l’administration Biden, toujours empêtrée dans la politique migratoire de l’ex-président Donald Trump, et qui peine à loger tous ces nouveaux arrivants dans des centres temporaires. Selon des chercheurs de l’Université Duke, cette fuite de migrants vers la frontière américaine s’explique par deux principaux facteurs: la violence qui sévit dans leur pays d’origine, ainsi que les impacts des changements climatiques.
Le document, publié le mois dernier, s’intéresse plus précisément au Honduras, l’un des pays d’où est originaire une bonne partie des migrants qui remontent vers le nord, en direction d’une Amérique idéalisée. « Le Honduras est l’un des pays les plus pauvres de l’Occident, l’insécurité alimentaire y est en hausse en raison des changements climatiques, et on y trouve l’un des plus hauts taux d’homicide de la planète », écrivent ainsi les chercheurs.
C’est ainsi l’avis de Sarah Bermeo, professeure associée à la Sanford School of Public Policy.
« Au cours de la dernière décennie, le pays a souffert de sécheresses répétées qui ont fait croître l’incertitude alimentaire, particulièrement pour les agriculteurs du couloir sec d’Amérique centrale, où certaines régions ont subi des pertes de leurs récoltes de l’ordre de 70% sur une base annuelle », lit-on encore dans le rapport.
« De la mauvaise gouvernance a vraisemblablement exacerbé ces problèmes et empêché de développer des solutions, pendant que les efforts visant à combattre la corruption ont pris du plomb dans l’aile, ces dernières années. »
Les travaux de l’Université Duke font aussi état de l’impact des ouragans Eta et Iota, qui ont tous deux frappé en novembre 2020, « et qui ont eu un impact humanitaire dévastateur, en plus de grandement affecter les infrastructures et nuire à la sécurité alimentaire au Honduras ». Le tout sans oublier la pandémie de COVID-19, « qui a contribué à ce qui était déjà une situation désespérée pour bien des Honduriens ».
Les chercheurs affirment par ailleurs « qu’il existe un lien solide entre la diminution des précipitations dans le corridor sec et le nombre d’arrestations de familles de migrants à la frontière américaine ». En moyenne, une baisse des précipitations de l’ordre de 50% entraînerait une hausse de 221 familles arrêtées à la frontière en tentant d’entrer illégalement aux États-Unis.
Un lien similaire existe aussi entre le taux de meurtres par 100 000 habitants, au Honduras, et le nombre d’arrestations à la frontière.
« Le lien statistique fort entre la violence, la réduction des précipitations et la migration ne pointe pas vers une baisse importante des demandeurs d’asile et des migrants climatiques. Pour répondre efficacement aux migrants et aux causes profondes de ces migrations, il est nécessaire que les décideurs tiennent compte des liens entre les changements climatiques et la violence », mentionne l’étude.
Ainsi, les chercheurs proposent de « donner plus de pouvoir aux agriculteurs et organisations locales en ce qui concerne la prise de décision en lien avec les investissements agricoles financés par l’aide internationale ». Ainsi, il serait envisageable de « développer les capacités de la société civile tout en améliorant la sécurité alimentaire ».
« L’administration Biden s’est engagée à fournir de l’aide étrangère pour s’attaquer aux causes des migrations », a déclaré Mme Bermeo. Une approche multiple visant à régler les problèmes de résilience agricole et de la violence, de la corruption et de la mauvaise gouvernance est la meilleure idée pour réduire le besoin, pour les Honduriens, de quitter leur pays. »