Dans une ville de Tokyo mystérieusement vidée de ses habitants, trois amis tentent de survivre à une série de jeux d’adresse, de hasard et d’endurance qui peuvent à tout moment provoquer une mort horrible. Dans quel but? Qui tire les ficelles? La première saison de la télésérie Alice in Borderland suscite bien des questionnements, mais sans offrir toutes les réponses.
Adaptée du manga du même nom créé par Aso Haro, Alice in Borderland met donc en vedette trois amis, tous trois désillusionnés par rapport à la vie de jeune adulte dans un Japon où tout se doit d’être hyperactif, hyperproductif et hypersérieux. Pour échapper à cette vie oppressante, ils s’offrent des moments de folie. C’est d’ailleurs l’un de ces moments, où ils tenteront d’échapper à la police, qui les mènera à être transportés dans un monde étrange. Tokyo est demeurée la même, mais les appareils électroniques ne fonctionnent plus, les habitants ont largement disparu, et d’étranges jeux sont offerts aux quelques personnes que l’on croise de temps en temps, dans les rues.
Ces jeux s’avèrent immédiatement mortels. Impossible, d’abord, de s’en échapper une fois que l’on a choisi d’y participer. Et pour ceux qui n’en respectent pas les règles, ou qui ne triomphent pas, la mort est la seule fin offerte.
Pire encore, s’il l’on réussit in extremis à s’en sortir, cette victoire n’est que temporaire, puisque l’on disposera d’un « visa » qui arrive généralement à échéance en quelques jours seulement. Si l’on ne renouvelle pas ledit visa, c’est la mort assurée (encore), cette fois à l’aide d’un laser sorti de nulle part qui pénètre toutes les surfaces et est assez puissant pour traverser d’un coup la tête d’une personne, la tuant instantanément.
C’est donc dans ce contexte plus que particulier qu’Arisu et ses deux amis (un bum travaillant autrefois dans un bar et un employé de bureau, tous deux particulièrement oubliables et évacués dès le troisième épisode de la saison) chercheront à percer les mystères de ce monde étrange. Arisu, un bon à rien qui passe ses journées à jouer à des jeux vidéo, mettra justement (et forcément) ses connaissances vidéoludiques à profit pour triompher des énigmes potentiellement mortelles qu’il devra surmonter.
Alice in Borderland évoque d’abord Cube, ce film canadien quasi-culte qui plaçait des étrangers dans un cube gigantesque dont les diverses sections étaient bien souvent truffées de pièges qui ne laissaient pas de place à l’erreur.
En soi, d’ailleurs, ce concept est bien intéressant. Plutôt que de confiner les participants à ce jeu macabre dans un monde fermé, c’est la ville qui sert de terrain de jeu, si l’on peut dire. Et l’utilisation de plusieurs endroits déjà existants, comme un immeuble à logements, un tunnel autoroutier, ou encore un jardin botanique, vient donner une touche « locale » à la chose.
Là où le bât blesse, c’est dans la construction scénaristique, et plus particulièrement du côté des personnages. Ceux-ci sont nombreux, certes, trop nombreux, même, mais à l’instar de beaucoup d’autres séries japonaises, plus particulièrement celles adaptées de mangas, ils sont bien généralement unidimensionnels.
Non pas que l’absence de profondeur des personnages soit un défaut typiquement japonais (ou asiatique, dans l’ensemble), mais dans cette première saison, ce trait de caractère unique de chacun des personnages sera poussé à son paroxysme, jusqu’à en devenir risible. Nous avons donc le joueur de jeux vidéo paresseux qui veut « profiter de la vie », la fanatique de sports souhaitant « venger » son père, un alpiniste disparu en montagne, l’ex-chapelier devenu chef de gang qui promouvait le vivre-ensemble, son bras droit et ami qui est obsédé par la violence, sans oublier le déprimé qui souhaite uniquement semer la mort.
Et tout ce beau monde a pratiquement droit à une présentation biographique complète, ce qui non seulement ressemble à du remplissage, mais qui accompagne des personnages qui meurent généralement au bout de deux ou trois épisodes, voire parfois un seul.
Pendant ce temps, on étire le mystère indument, on révèle finalement peu ou pas de choses sur les organisateurs de cette mystérieuse danse avec la mort – qui non seulement peuvent faire disparaître les dizaines de millions d’habitants de Tokyo en un clin d’oeil, mais semblent aussi pouvoir manipuler le temps, sans oublier les lasers hyperpuissants –, avec un je ne sais quoi évoquant les pires saisons de la série Lost, bien connue pour ses trames scénaristiques inachevées et ses mystères non résolus.
On regardera avec curiosité la deuxième saison d’Alice in Borderland, mais sans trop retenir son souffle, bien honnêtement.