Le Canada contribue sciemment à un réseau de pêche illégale et non réglementée, en plus de contribuer à des violations des droits de la personne, sans parler des impacts sur l’environnement: voilà le constat sans appel de l’organisme Oceana Canada qui, dans un récent rapport, affirme que le Canada reste les bras croisés devant ces graves problèmes, alors que la population souhaiterait plutôt plus de transparence dans ce domaine.
Dans un document intitulé Untraceable – The consequences of Canada’s poorly regulated seafood supply chains, Oceana affirme notamment que cette incapacité à réglementer efficacement l’industrie de la pêche coûte notamment près de 94 millions de dollars au Trésor fédéral, tous les ans.
Pire encore, les consommateurs d’ici dépenseraient jusqu’à 160 millions de dollars, chaque année, pour acheter des produits mal étiquetés, résultant de la pêche illégale, voire provenant du résultat du travail d’esclaves contemporains.
« Le Canada n’a pas les normes de traçabilité adéquates pour réglementer nos chaînes d’approvisionnement et prévenir la pêche illégale, la fraude et l’étiquetage trompeur des produits de la mer, » affirme Sayara Thurston, Spécialiste de campagne, fraude des produits de la mer pour Oceana Canada. « Le gouvernement doit concrétiser son mandat et implanter une traçabilité du navire à l’assiette, afin d’éviter de nous laisser bien loin derrière les autres pratiques exemplaires internationales. Ce mandat est dans le meilleur intérêt des consommateurs comme du secteur des pêches. Les Canadiens méritent d’avoir confiance en leurs produits de la mer et savoir qu’ils sont sécuritaires, étiquetés honnêtement et capturés légalement. »
Dans une étude menée dans six villes canadiennes entre 2017 et 2019, Oceana dit avoir constaté que 47% des échantillons de produits de la mer vendus en épicerie et dans des restaurants étaient mal identifiés.
L’organisation cite par ailleurs une étude de 2020 effectuée par Abacus Data, qui révèle que 94% des répondants sont en faveur d’un engagement du gouvernement fédéral pour mettre en place un programme de traçabilité des produits de la mer; plus de la moitié des personnes interrogées seraient même « très favorables » à l’instauration de ce système.
Et si Ottawa a dit reconnaître, l’an dernier, l’existence de ce problème, rappelle Oceana, « aucun échéancier n’a été établi » en ce sens, lit-on dans le rapport. La pandémie de COVID-19 n’aura certainement pas aidé à raccourcir les délais dans ce dossier.
À l’échelle mondiale, les prises halieutiques mal identifiées, illégales et liées à l’esclavage représenteraient 26 millions de tonnes, ou encore l’équivalent de 30% des pêches planétaires, pour un total variant entre 10 et 23 milliards de dollars américains.
L’industrie canadienne de la pêche pourrait perdre jusqu’à 379 millions de dollars par année des suites de ces démarches illégales, soutient encore Oceana.
« La pêche illégale mondiale ne peut prendre fin que si tous les pays ferment leurs portes à ces produits », souligne le rapport. « Tous les produits importés devraient pouvoir être retracés jusqu’à leur navire de pêche à l’aide d’informations numériques, et les principales informations à propos des prises devraient être disponibles tout au long de la chaîne d’approvisionnement. »
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