Ce dimanche après-midi, à la Maison symphonique, la scène était encombrée: il y avait dessus un piano et Maurizio Pollini. En fait, on pourrait dire que la salle au complet était remplie de M. Pollini et de son interprétation. Mais revenons un peu en arrière et énumérons le programme de ce récital organisé par l’Orchestre symphonique de Montréal.
De Frédéric Chopin: Prélude en do dièse mineur, op. 45, Barcarolle en fa dièse majeur, op. 60 et la Sonate no 2 en si bémol mineur, op. 35.
De Claude Debussy: Préludes, Livre II.
Le célèbre pianiste était attendu, c’est le moins qu’on puisse dire. Nous étions là pour entendre exactement ce qu’il nous a donné. D’abord, un prélude de Chopin tout en nuances, en rondeur (quelle maîtrise il a de la pédale forte) et en délicatesse. Ensuite, une barcarolle pleine de vie, de soleil, de joies enfantines et de relents printaniers. Puis est venue la grande œuvre, la sonate ! Rien de trop exigeant, apparemment, pour ce musicien qui n’est plus tout jeune. Il a beau avoir pris de l’âge et paraître vouté lorsqu’il marche, il est énergique comme aux premiers jours quand il attaque son instrument. Il y est même allé un peu fort dans la marche funèbre (lento) de la sonate. Une sonate à laquelle il a insufflé toute la grandeur qu’elle mérite.
Après l’entracte, le programme annonçait 35 minutes pour l’interprétation des Préludes, Livre II du compositeur français. On aurait dit qu’il manquait une partie au programme. Mais revenons au Debussy. Malgré la présence de seulement deux compositeurs au menu de la soirée, cela a suffi pour démontrer la polyvalence du maître qui s’est montré aussi à l’aise dans la modernité et les sursauts des Préludes que dans le romantisme et la virtuosité du Chopin. Le programme s’est donc terminé dans l’allégresse et la satisfaction évidente des amateurs. Mais la soirée, elle n’était pas finie. En effet, ce grand interprète nous a gratifiés d’un magnifique rappel, puis d’un autre et d’un autre encore et avec le sourire en plus. C’était à se demander qui viendrait à bout de l’autre: la foule avec ses applaudissements ou le pianiste avec son répertoire qui semblait infini. C’en était rendu drôle tout autant qu’adorable, mais surtout tellement beau. Merci M. Pollini.