Engagé par un puissant avocat du Caire pour enquêter sur le possible meurtre d’une jeune femme que celui-ci avait pris sous son aile, Makana, le détective héros des livres de l’auteur Parker Bilal, quitte cette fois la capitale égyptienne pour les confins du désert, dans la ville de Siwa, où il devra rouvrir de vieilles plaies pour obtenir les réponses désirées.
Après l’excellent Meurtres rituels à Imbaba, voilà donc Bilal qui récidive et offre un nouveau chapitre des enquêtes de Makana, ce policier déchu dont le passé l’attire toujours plus loin au sud. Vers le Soudan. Vers le drame qui a changé sa vie à jamais.
À Siwa, traditions millénaires, corruption et exploitation touristique font difficilement bon ménage. Si une partie de sa population a soif de modernité, les autres habitants, eux, s’accrochent encore à des chimères, quand ils ne profitent pas carrément du fait qu’ils se trouvent à l’orée des dunes éternelles et du reste de l’immense Afrique pour se livrer à un commerce tout à fait illicite. Est-ce là le destin du continent africain, celui de participer au grand brassage des peuples, des coutumes et des origines, mais uniquement dans le cadre d’un jeu mortellement violent qui n’avantage que les mieux nantis, les plus forts?
Dans cette escale de Siwa, donc, tout est plus lent, plus méticuleux. Bilal y crée un univers semblant exister en-dehors du temps. Si, dans la capitale, c’est la guerre au terrorisme post-11 septembre qui fait rage, à Siwa, on s’attarde bien davantage au passé. Un passé pour lequel on a déjà commis l’impardonnable. Et pour lequel on semble être prêt à recommencer.
Si la raison pour laquelle Makana se retrouve coincé à Siwa est un peu tirée par les cheveux – le sergent de la police locale veut obtenir de l’aide pour tirer au clair un meurtre crapuleux -, l’auteur réussit à nouer adroitement les fils de l’enquête et éviter que l’action ne tourne à vide.
Le lecteur aurait toutefois pu apprécier que Bilal consacre un peu plus de temps à l’histoire personnelle du héros. Sa fille, dont la survie avait été évoquée dans le précédent ouvrage, est-elle finalement vivante ou morte? Makane finira-t-il par connaître la vérité à ce sujet? Cruellement – ou fort adroitement -, l’auteur refuse de trop en révéler. De quoi nous donner hâte, de façon tout à fait justifiée, à un prochain roman.
Les ombres du désert, de Parker Bilal, publié aux éditions du Seuil, 426 pages