Jusqu’au 31 octobre, le Centre PHI présente Sexe, désirs et data, une exposition interactive offerte aux 16 ans et plus et s’articulant autour du télescopage entre ce besoin primaire (voire primal) de reproduction, de trouver du plaisir en étant seul ou accompagné, et l’orgie de données liées à notre utilisation des applications de rencontre, des réseaux sociaux, ou encore l’utilisation du web pour donner libre cours à des identités longtemps réprimées, voire punies.
Sur papier, l’idée est particulièrement intéressante: les relations interpersonnelles, le sexe, la recherche d’une relation, l’utilisation de la technologie pour trouver un ou une partenaire, ou encore la multiplication des perspectives en matière de plaisir, l’expression de soi, voire la protection de la vie privée, ou encore la consommation de contenus pornographiques… tout cela est lié, de près ou de loin.
Et les gestionnaires du Centre PHI ont tenté de ratisser large pour justement s’intéresser au plus grand nombre de sous-sujets possible, avec un espace d’exposition réparti sur deux étages.
Malheureusement, cette volonté d’aborder le plus grand nombre de questions a fait en sorte que Sexe, désirs et data est une exposition brouillonne, à la fois surchargée et décharnée, avec certains moments qui évoquent étrangement un manque d’inspiration ou de volonté d’aller au fond des choses.
Commençons par le commencement: on nous présente Maxxx, un robot conversationnel non genré avec qui nous avons l’occasion d’échanger, sur notre téléphone intelligent, tout au long de la visite. Mais voilà: nous sommes dans un musée, avec des installations visuelles qui exigent notre attention. Pourquoi voudrait-on passer encore plus de temps le nez rivé sur notre téléphone, alors que l’on nous a préparé une série de salles interactives?
Et c’est malheureusement ce genre de choses qui se multiplient tout au long de la visite, sauf à deux rares occasions. Mais avant d’atteindre ces moments intéressants, il faudra notamment endurer une séance de speed dating à l’aide d’une fausse application de rencontre, le tout soumis au bon vouloir de cinq visiteurs à la fois. Pour quiconque a déjà tenté sa chance sur les applications en question, l’expérience est… ordinaire.
Où sont les questionnements sur le développement des algorithmes? Où sont les craintes des membres de la communauté LBGTQ+ à propos d’un risque d’être reconnu(e), dans un contexte risqué? Pourquoi ne nous parle-t-on pas de toutes ces données qui s’accumulent dans des centaines, voir des milliers de bases de données? Pourquoi ne parle-t-on pas de la chasse aux contenus pour adultes sur des sites comme Reddit, ou encore Imgur? Pourquoi n’aborde-t-on pas la question d’OnlyFans, Fansly et consorts? Et cela, ce n’est qu’un aperçu des centaines de sujets qui auraient pu bénéficier d’un examen plus complexe.
On saluera toutefois deux choses: la première, c’est qu’à deux reprises, on présente des oeuvres spécifiquement consacrées aux personnes LGBTQ+, qu’il s’agisse d’une femme trans qui tente de rencontrer un homme en ligne, ou encore de cette carte du monde interactive où des habitants queers de tous les pays ont pu partager leurs expériences.
La seconde, c’est que le Centre PHI a spécialement prévu la possibilité de prendre un moment pour soi, ou de parler avec des spécialistes, si besoin est.
Autrement, malheureusement, la chose tient de l’occasion manquée. Oui, tout aborder était impensable, puisque le sujet est presque aussi vaste que la société humaine en général. Mais on aurait apprécié que l’on aille davantage au fond des choses, plutôt que de rester bêtement en surface.