Les plus vieux (seigneur) d’entre nous se souviennent du tout premier volet de la série Toy Story, avec cette rivalité acerbe entre Woody, le jouet de longue date d’Andy, et Buzz Lightyear, le nouveau venu qui finira par tout bousculer. Voilà que Disney propose Lightyear, le film qui aurait été à l’origine de la fascination du jeune garçon pour cet explorateur spatial décliné en d’innombrables produits dérivés.
Embarqué à bord d’un gigantesque vaisseau d’exploration, le ranger spatial Buzz Lightyear est sorti de son sommeil cryogénique par l’ordinateur de bord, et décide d’autoriser l’exploration d’une étrange planète dont on ignore à peu près tout.
En compagnie de son amie Alisha Hawthorne, Buzz est attaqué par la faune et la flore locales. Cette même flore menace même d’engloutir leur vaisseau, poussant notre héros à mettre les gaz à toute vitesse… Ce qui entraînera éventuellement un accident et l’écrasement du vaisseau en question. Coincés sur ce monde inhospitalier, les passagers du vaisseau tenteront de trouver une façon de fabriquer le carburant hyperspatial nécessaire pour retourner dans l’espace et terminer la mission d’exploration.
Le hic, c’est que la formule mise au point par les chercheurs ne fonctionne pas, et que Buzz « gaspille » quatre années lors de chaque essai qui, pour lui, ne dure que quelques minutes. À force d’entêtement, voilà que Buzz « voyage » pendant une soixantaine d’années, sans prendre une seule ride. Et après un ultime essai, il découvrira que la colonie humaine est attaquée par le sinistre Zorg, un seigneur robot maléfique. Saura-t-il triompher de l’adversité, aidé d’une équipe peu ou pas entraînée?
Fondamentalement, rien ne permet de parler de Lightyear comme d’un mauvais film. L’animation est splendide, les personnages sont suffisamment attachants – surtout Sox, le chat robotique, qui multiplie les gags et les clins d’oeil –, la musique est enlevante… Mais rien ne permet non plus de parler de Lightyear comme d’un grand film. On n’y trouve pas, par exemple, cette notion de liens familiaux comme dans le fantastique Encanto, pas plus qu’on n’y présente l’histoire d’une personne dénuée de talents particuliers qui apprend à surmonter les obstacles pour prouver sa valeur. Non, on y raconte les aventures d’un individu qui est déjà surdoué, et qui doit s’attaquer à un nouveau défi. Rien de condamnable, certes, mais rien de révolutionnaire, non plus.
Et on ne s’attardera pas sur la fausse controverse concernant le couple de femmes qui s’embrassent, pendant à peu près une seconde, au début du film. Le plus fâchant, dans cette histoire, ce ne sont pas les conservateurs qui, supposément outrés, ont parlé de la « déchéance morale » de la société américaine… Comme s’ils ne se vautraient pas dans la pornographie lesbienne.
Non, le plus fâchant, c’est le fait que Disney a prévu cette scène comme étant facile à couper au montage. D’ailleurs, dans la version visionnée par ce journaliste, ledit baiser, qui est tout à fait innocent, n’apparaît même pas.
Pourquoi ne pas avoir fait preuve de fermeté morale, pour une fois, et ne pas avoir présenté un couple homosexuel comme étant central au déroulement du scénario? Pourquoi Buzz Lightyear ne tombe-t-il pas amoureux d’un homme? Disney se plaît à se prétendre progressiste, tout en s’assurant que ces miettes d’ouverture d’esprit puissent être rapidement balayées sous le tapis. Il ne faudrait pas empêcher que sonne le tiroir-caisse, après tout!
Bref, avec une histoire sympathique, mais relativement ordinaire, et avec une controverse qui découle à la fois de l’obscurantisme d’une partie de son public, et d’une volonté de jouer sur tous les tableaux, Disney propose un Lightyear qui fait sourire, certes, mais qui ne passera pas à l’histoire. Et c’est bien dommage.