Quiconque a déjà vu un chat sentir de l’herbe à chat sait que ce produit les rend un peu fous : ils s’y frottent, s’y roulent, le mâchent et le lèchent de façon agressive. Il est largement accepté que cette plante et son équivalent asiatique, l’Actinidia polygama, possèdent des propriétés intoxicantes, mais cela pourrait ne pas être la seule raison pour laquelle elles déclenchent un enthousiasme si marqué chez les félins.
En fait, des chercheurs japonais ont découvert que lorsque les chats endommagent de l’herbe à chat, cela libère une quantité bien plus importante de répulsif à insectes, ce qui indique que le comportement des chats permet à ceux-ci de se protéger contre les créatures nuisibles.
Ces travaux ont été publiés dans iScience.
La réaction des chats à ces deux plantes est si spécifique que le principal auteur des travaux, Masao Miyazaki, un chercheur dans le domaine du comportement animal à l’Université Iwate, s’est dit qu’il devait faire la lumière sur ce phénomène. « Même dans la comédie musicale Cats, il y a des scènes où vous voyez un chat en intoxiquer un autre avec de la poudre d’herbe à chat », mentionne-t-il.
Les feuilles de l’herbe à chat et de l’Actinidia polygama contiennent les composantes chimiques appelées népétalactol et népétalactone, des iridoïdes (des composantes qui confèrent certaines particularités aux plantes) qui protègent les plantes contre les insectes nuisibles. Pour voir comment le comportement des chats affectait les produits chimiques libérés par les plantes, M. Miyazaki a travaillé avec des chimistes de l’Université Nagoya. « Nous avons découvert que les dégâts physiques provoqués par les chats favorisait l’émission immédiate d’iridoïdes, dans une proportion 10 fois plus importante qu’avec des feuilles intactes », a indiqué le chercheur.
Non seulement y a-t-il une libération plus importante d’iridoïdes, mais leur composition change d’une façon qui semble encourager les chats. « Le népétalactol représente environ 90 % de l’ensemble des iridoïdes dans une feuille intacte, mais cette proportion chute à environ 45 % dans les feuilles endommagées, alors que la proportion d’autres iridoïdes augmente fortement », a encore indiqué M. Miyazaki. « La composition d’iridoïdes altérée correspondant aux feuilles endommagées favorisait une réponse encore plus prolongée de la part des chats. »
Lors de précédents travaux, M. Miyazaki et son équipe de recherche avaient démontré que ces composantes étaient efficaces pour repousser les moustiques de l’espèce Aedes albopictus. L’équipe a maintenant prouvé que lorsque les chats endommagent les feuilles en s’y frottant, en s’y roulant, en les léchant et en les mâchant, les propriétés « repoussoir » étaient encore plus efficaces. La diversification des iridoïdes dans les feuilles endommagées d’Actinidia polygama accroît la protection contre les moustiques, même quand la concentration de ces composantes est basse.
Pour tester si les félins réagissent spécifiquement à ces composantes, ceux-ci ont reçu des plats contenant de la népétalactone et du népétalactol purs. « Les chats démontrent la même réponse aux cocktails d’iridoïdes qu’aux plantes naturelles, sauf lorsqu’il est question de mâcher le produit », mentionne M. Miyazaki. « Ils lèchent les produits chimiques dans le plat et s’y frottent, en plus de rouler sur eux-mêmes par-dessus le plat en question. »
« Lorsque des cocktails d’iridoïdes ont été déposés sur le fond de plats qui ont ensuite été couverts par un couverture en plastique troué, les chats ont quand même cherché à lécher et à mâcher, même s’ils ne pouvaient pas directement entrer en contact avec les produits chimiques », a ajouté le chercheur.
« Cela signifie que ces deux comportements sont instinctifs, et sont déclenchés par une stimulation olfactive imputable aux iridoïdes. »