S’il existe plusieurs facteurs qui contribuent au fléau de la violence par armes à feu aux États-Unis, une chose est claire : les données – et la majorité des Américains – sont favorables à des lois qui restreignent largement l’accès à ces armes sous certaines conditions.
« Nous avons des solutions basées sur les preuves qui existent, en ce moment, qui ont la faveur d’une majorité d’Américains de diverses origines et historiques », mentionne Cassandra Crifasi, directrice de la recherche et des politiques au Johns Hopkins Center for Gun Violence Solutions. « Nous avons les outils, nous avons les appuis et nous devons agir. »
Mme Crifasi et quatre de ses collègues se sont penchés sur les politiques qui fonctionnent pour réduire la violence par armes à feu, en plus d’obtenir l’appui du public. Selon ces chercheurs, il est important de s’intéresser aux méthodes visant à réduire la violence armée dans les écoles, les complications liées aux politiques et outils plus « extrêmes », et les effets des lois sur les armes à feu sur la participation à la vie démocratique.
Selon Daniel Webster, il existe actuellement des lois, aux États-Unis, qui sont inutiles lorsque vient le temps de réduire la violence par armes à feu, et qui ont en fait un effet inverse sur le phénomène. Pour lui, il faut ainsi changer les dispositions qui permettent d’acheter des armes à feu malgré un historique récent de violence, ou encore celles qui donnent aux personnes de moins de 21 ans la possibilité d’acheter des armes.
M. Webster juge par ailleurs que permettre l’achat d’armes par des adultes d’à peine 18 ans font croître le nombre de suicides. Et impossible de passer sous silence, dit-il, les lois qui permettent de porter une arme sans formation, sans vérification des antécédents, ou sans permis obligatoire, puisqu’il a été prouvé qu’elles menaient à une augmentation de la violence avec le temps.
Mais lorsque des lois sont mises en place pour restreindre les achats d’armes, ou qui empêchent des individus à risque d’en posséder, les morts liées aux armes à feu diminuent.
« Nous avons constaté que les lois qui empêchent temporairement l’achat et la possession d’armes par des personnes reconnues coupables d’actes violents, ou par ceux qui sont sous le coup d’une ordonnance liée à de la violence domestique réduisent le nombre d’homicides », a-t-il ajouté.
Des lois qui fonctionnent
« Les études initiales sont très encourageantes et démontrent que ces lois peuvent empêcher des tueries de masse, de la violence politique et, de façon plus répandue, des tentatives de suicide. »
Et ces politiques qui ont fait leurs preuves, a poursuivi Mme Crifasi, sont loin d’être aussi controversées que ne l’avancent les médias. « Bien des Américains, y compris la majorité des détenteurs d’armes, appuient des politiques basées sur des preuves », dit-elle.
Ainsi, comme l’explique la chercheuse, les lois exigeant que les acheteurs d’armes obtiennent un permis auprès des autorités pour que celles-ci vérifient leur identité et s’assurent qu’ils ne sont pas frappés d’un interdit obtiennent l’appui de plus de 75 % des Américains, de 63 % des propriétaires d’armes et de 70 % des républicains.
Les lois qui autorisent le retrait temporaire des armes lors des périodes de risque important ont l’aval de 75 % des Américains, de plus des deux tiers des propriétaires d’armes et de 75 % des républicains.
Par ailleurs, entre autres exemples, Mme Crifasi indique qu’une interdiction d’achat d’armes à feu, qu’il s’agisse d’armes de poing ou d’armes semi-automatiques, obtient l’appui d’au moins les deux tiers des habitants du pays de l’Oncle Sam, et d’une majorité marquée de républicains.
Et à l’autre extrémité du spectre, les lois permissives sont moins populaires, indique encore la chercheuse. Seulement 25 % des Américains et le tiers des propriétaires d’armes appuient le port d’arme sur le terrain des écoles primaires. « Dit d’une autre façon, plus de la moitié des détenteurs d’armes sont favorables à des restrictions en matière d’endroits où ils peuvent porter une arme. »
Dans la même perspective, « seulement 20 % des Américains et moins du tiers des propriétaires d’armes pensent qu’il est avisé de permettre aux gens de transporter des armes de poing chargées et cachées en public, le tout sans permis », a encore mentionné Mme Crifasi.
Malgré cet appui solide en faveur de certaines mesures de contrôle des armes, le défi se trouve du côté de la transposition de cet appui en des lois mises en place par les élus. « Dans notre pays, on nous fait croire qu’il existe un fossé entre les détenteurs d’armes et les autres, ou entre les partis politiques, en matière de solutions pour lutter contre la violence par armes à feu, et c’est pour cela que nous ne pouvons rien faire. Je dis que le contrôle des armes est largement politique chez les politiciens », a déclaré la chercheuse.