Les utilisateurs réagissent habituellement aux pannes de médias sociaux avec des déclarations colériques et des blagues sarcastiques. Mais des chercheurs soutiennent que l’absence d’accès aux médias sociaux permet de mesurer l’importance de ces services non seulement comme outils pour socialiser et se divertir, mais aussi comme des services aussi essentiels que le gaz naturel, ou encore l’électricité.
Dans le cadre d’une étude des réactions liées à une panne de Facebook qui a duré six heures, à l’automne 2021, les chercheurs ont indiqué que les utilisateurs se sont tournés en masse vers le service rival qu’est Twitter, et ont publié près d’un quart de million de messages à propos de la panne, en rendant du même coup le mot-clic #facebookdown très rapidement populaire.
Si nombre de ces commentaires exprimaient de la colère à propos de la situation, et que d’autres tournaient Facebook en ridicule, plusieurs utilisateurs ont aussi exprimé leur besoin de trouver d’autres médias sociaux, selon S. Shyam Sundar, l’un des auteurs des travaux.
« La plupart des recherches sur l’impact des médias visent à présenter du contenu médiatique à des gens et à observer leurs réactions, mais dans le cadre de notre étude, nous voyons que le fait de retirer un canal de diffusion peut en fait dévoiler davantage d’informations », mentionne M. Sundar.
« Ce genre de panne nous offre l’opportunité de voir comment les gens réfléchissent à leur accès aux médias sociaux, et ce que nous voyons, c’est que ces services sont devenus si importants qu’ils sont maintenant des quasi-services publics. »
Toujours selon M. Sundar, certains utilisateurs des médias sociaux, particulièrement les entrepreneurs et les hommes d’affaires, s’appuient autant sur les médias sociaux, pour fonctionner, que les entreprises ont besoin d’autres services publics.
« Ce n’est pas seulement que les gens en sont dépendants à un niveau social », dit-il. « Lorsque ces médias sociaux tombent en panne, c’est la même chose pour les entreprises. Bien des gens effectuent des transactions grâce à l’ensemble des applications liées à Facebook, comme WhatsApp et Instagram. Il y a des médias qui ne sont uniquement que sur Facebook et des petites entreprises et des entrepreneurs qui y tiennent leur boutique, comme des classes de yoga offertes via Facebook. Alors, pour certaines personnes, c’est un service public, parce que c’est essentiel pour gagner leur vie. »
Les tweets exprimant le désir de trouver une autre forme de média social se sont en fait multipliés à mesure que la panne se poursuivait, selon les chercheurs. Au total, 29 000 messages de ce genre ont été recensés.
De son côté, Mengqi Liao, principal auteur de l’étude, affirme que les travaux suggèrent que si les internautes peuvent être dépendants d’un média social, cela ne veut pas dire qu’ils sont nécessairement loyaux à un site, comparativement à un autre.
« Ce que nous avons vu, à mesure que la panne se poursuivait, c’est que le désir de trouver une autre plateforme prenait de l’ampleur. En fait, cette volonté était le seul sujet à gagner en ampleur pendant les six heures de panne », dit-il.
Une cure de désintox?
Autre sujet populaire pendant la panne, plusieurs utilisateurs souhaitaient carrément quitter les médias sociaux. Au total, environ 35 000 tweets évoquaient une « détox » complète des plateformes.
« Au-delà de la moquerie des utilisateurs et de leurs descriptions de leurs efforts désespérés pour se connecter, nous croyons qu’il est intéressant que certaines personnes évoquent aussi ce départ des plateformes », indique M. Liao.
Selon M. Sundar, l’étude indique que les plateformes de médias sociaux doivent se pencher sur les pannes aussi sérieusement que les compagnies de services publics, qui se préparent constamment à cette éventualité et préparent des plans de communication pour aider les clients à passer à travers ces interruptions.