Il y a de ces jeux qui veulent non seulement ébranler les colonnes du temple, mais carrément casser le moule des jeux d’exploration qui triturent nos méninges. Avec Superliminal, les gens de chez Pillow Castle passent bien près de réussir quelque chose de franchement impressionnant.
Tout commence avec un rêve. Mais est-ce vraiment le pays des songes, ou plutôt un environnement spécialement créé pour y égarer votre subconscient, pendant que vous ronflez paisiblement, quelque part dans un autre endroit. Ou un univers parallèle, allez savoir.
Ce qui détonne, en fait, c’est la capacité d’interagir avec le décor de telle façon que cela semble violer les lois de la physique. Ou sont-ce plutôt celles de la perspective?
Dans cette série de pièces en enfilade, donc, le joueur comprendra bien assez vite qu’il peut agir sur la taille de divers objets en faisant varier la perspective employée. Si l’on s’empare d’un bloc déposé sur une table, par exemple, celui-ci pourra prendre des dimensions beaucoup plus importantes si l’on se retourne vers l’autre extrémité de la pièce où l’on se trouve. Au joueur d’apprendre à gérer ces cas de perspective forcée, donc, alors qu’il faudra régulièrement accroître ou réduire la taille d’objets divers pour progresser dans le jeu, histoire d’atteindre une porte placée en hauteur, ou encore de s’assurer qu’un objet appuie constamment sur une plaque pour garder une porte ouverte.
Les développeurs s’en sont vraisemblablement donné à coeur joie en programmant des pièces parfois franchement déjantées où il faudra faire preuve de beaucoup d’imagination pour parvenir à ses fins.
Impossible, par ailleurs, de ne pas établir de comparaisons avec la série Portal. Dans les deux cas, des pièces se succèdent où il faut utiliser la mécanique principale du jeu (les portails dans le cas de… eh bien, dans Portal, le redimensionnement d’objets dans Superliminal) pour réussir le casse-tête. On détecte également, de par le côté un peu sombre, un peu étrange – sommes-nous vraiment dans un rêve? Que se passe-t-il avec tous ces gens qui parlent de tenter de nous réveiller? Pourquoi revient-on constamment sur nos pas? –, un soupçon d’influence de The Stanley Parable, qui donnait joyeusement dans les propositions à la fois loufoques et lourdes de sens.
Malheureusement, si les intentions des développeurs de Pillow Castle sont nobles, si l’on s’amuse bien à forcer notre cerveau à adopter une nouvelle façon de voir le monde, si l’on ne peut s’empêcher de sourire en trouvant la solution à une énigme passablement complexe, force est d’admettre que Superliminal est… vide. Alors qu’autant Portal que The Stanley Parable offraient une narration de très grande qualité pour accompagner un joueur qui était forcément seul, ici, les extraits de conversations et la structure narrative du jeu est particulièrement mince. Résultat, on se trouve à errer dans les corridors en réussissant des énigmes, certes, mais en se disant un peu que tout cela ne sert pas à grand chose. La répétition finit également par tomber quelque peu sur les nerfs, alors que les variations constatées dans Portal ne sont pas présentes, ici.
Est-ce à dire que Superliminal est un jeu inintéressant? Pas tout à fait. Le titre a ses bons, voire ses très bons moments, mais impossible de passer outre les géants dans les pas desquels il tente de marcher. Si l’on recherche un titre mêlant énigmes et contemplation, le jeu est idéal. Sinon, Portal et sa suite sont toujours disponibles sur Steam…
Superliminal
Développeur et éditeur: Pillow Castle
Plateforme: Windows (Epic Games Store)
Jeu disponible en français