Comment les humains ont-ils appris à marcher? Sont-ils descendus des arbres en sachant déjà se tenir debout, ou ont-ils développé cette capacité un ou deux millions d’années après avoir foulé le plancher des vaches? En l’absence de preuves tangibles sous la forme de fossiles, deux théories opposées font depuis longtemps l’objet de débats. Mais il semblerait que les deux idées soient erronées.
Selon la première théorie, les humains marchant debout ont évolué à partir d’une créature à quatre pattes, similaires aux singes contemporains, qui pouvait déposer l’entièreté de son pied à plat sur le sol.
La deuxième théorie postule que l’évolution est survenue chez des animaux semblables aux chimpanzés, et que ceux-ci savaient déjà marcher droit avant de descendre des arbres.
Les experts s’entendent généralement pour dire que nos ancêtres ont effectué leurs premiers pas, debout sur le sol, il y a de cinq à sept millions d’années.
Il semblerait toutefois que sur ce point, tous se trompent.
Dans une étude récemment publiée dans Nature, des scientifiques décrivent des fossiles appartenant à un animal précédemment inconnu qui remonte à 11,6 millions d’années, et qui porte à croire qu’il existait une nouvelle forme de « comportement positionnel » appelé « grimpe à l’aide de membres étendus ».
Une équipe menée par Madelaine Boehme, professeure à l’Université de Tubingen, affirme que ce grand singe, Danuvius guggenmosi, possédait des os complets dans ses membres, os qui ont été déterrés dans le sud de l’Allemagne.
Cela aurait permis aux chercheurs de déduire que cet animal pouvait se suspendre aux branches des arbres par ses bras. Il aurait également été capable de tenir ses membres droits, avec un pied qui aurait pu être déposé sur le sol.
« Avec un large thorax, une longue colonne vertébrale et des hanches et des genoux étendus, comme chez les bipèdes, ainsi qu’avec des membres antérieurs entièrement déployés, comme chez tous les grands singes, Danuvius combine l’adaptation des bipèdes » avec les singes qui se tenaient dans les branches d’arbres, concluent-ils.
Cela fournit « un modèle pour l’ancêtre commun des grands singes et des humains ».
Un ancêtre commun?
Du point de vue de l’évolution, en d’autres termes, Danuvius guggenmosi pourrait avoir été capable de marcher sur ses jambes étendues, dans les arbres, avant de descendre au sol, et non pas après.
En commentant l’étude, Tracy L. Kivell, de l’Université du Kent, au Royaume-Uni, affirme que le fait de répondre au « comment » et au « pourquoi » de l’évolution des singes vers des humains capables de marcher dépend largement de la façon dont ils pouvaient se déplacer auparavant.
« Ont-ils évolué d’un ancêtre qui vivait principalement dans les arbres, ou ces ancêtres marchaient-ils déjà à quatre pattes sur le sol, avant d’évoluer pour marcher sur deux jambes? »
Selon Mme Kivell, les singes africains – chimpanzés, bonobos et gorilles – passent la plupart de leur temps à marcher sur leurs jointures, au sol, bien qu’ils grimpent dans les arbres pour se nourrir, pour se protéger et pour dormir.
En contraste, les orangs-outans – dont le nom se traduit par « homme de la jungle » – vont marcher sur leurs jambes étendues dans les branches, en faisant écho, affirment certains chercheurs, aux ancêtres de l’humain moderne.
La nouvelle étude, avance Mme Kivell, évoque un singe qui se déplaçait d’une façon inconnue jusqu’alors, et qui pourrait être « le meilleur modèle, jusqu’à maintenant, de ce à quoi aurait pu ressembler un ancêtre commun aux humains et aux singes africains ».