Comme s’il avait été inspiré par les présentations théâtrales des nouveaux iPhone, c’est à l’aide d’un spectacle sons et lumières que le milliardaire Jeff Bezos a dévoilé jeudi dernier son futur module lunaire. Mais en réalité, l’élément-clef de la présentation était plus prosaïque: l’exploitation minière de la Lune.
Ce n’est pas l’angle d’attaque le plus émouvant pour vendre un retour sur la Lune, mais la présentation rappelle que cet aspect pourrait devenir le plus convaincant pour d’éventuels investisseurs.
On a beaucoup plus parlé, ces dernières années, du plus flamboyant Elon Musk, celui dont la fusée Falcon 9, de la compagnie SpaceX, met en orbite des satellites depuis 2010, a commencé à ravitailler la station spatiale, pourrait envoyer des astronautes d’ici peu, et rêve en même temps de coloniser Mars. Mais Jeff Bezos, fondateur et propriétaire d’Amazon, a beau être moins flamboyant, lui aussi possède sa compagnie spatiale, Blue Origin, qui construit elle aussi une fusée réutilisable capable de se rendre en orbite terrestre, New Shepard — si tout va bien, des « touristes » pourraient y faire un « saut » de moins d’une heure en apesanteur dans deux ans — et dont une version géante, New Glenn, serait en théorie capable d’envoyer des astronautes vers la Lune d’ici quelques années. C’est donc une partie de cette « course à l’espace » qui a été dévoilée jeudi dernier.
Bien que le terme de « course » n’ait pas été employé, l’analogie n’a pas échappé aux observateurs. Parce que Jeff Bezos a fait une allusion aux déclarations récentes du vice-président des États-Unis, qui souhaiterait voir des Américains se poser sur la Lune dès 2024 plutôt que 2028. Or, pour avoir une chance d’y arriver, tout laisse croire qu’il faudra se fier sur une fusée d’une compagnie privée plutôt que sur celle que prépare la NASA. Pour l’instant, l’avantage est encore à Musk, sa fusée Falcon 9 bénéficiant d’années d’expériences que n’a pas la compagnie Blue Origin.
Sauf que ce que Bezos a vraiment fait miroiter — avant son rêve de voir des millions de personnes migrer vers des stations spatiales — c’est la raison économique d’un retour vers la Lune. Particulièrement près du pôle Sud: la présence présumée de glace et le soleil qui y brille continuellement, permettraient d’alimenter en énergie une base permanente, premier pas vers une exploitation des ressources lunaires. Ce n’est pas un hasard si la principale différence entre le module Blue Moon présenté par M. Bezos et le module lunaire Apollo de jadis, est que le petit nouveau aurait la capacité de transporter six tonnes et demi d’équipements.
Ce qui laisse en plan un léger détail: qui possèderait les ressources lunaires? Sur Terre, un pays peut exploiter ses ressources naturelles ou en vendre l’exploitation à un tiers, mais sur la Lune, qui peut vendre à qui? Le Traité de l’espace de 1967, signé par 108 pays dont les États-Unis, stipule que l’exploration de « l’espace extra-atmosphérique » doit bénéficier à tous et qu’aucun pays ne peut s’approprier un corps céleste, par exemple la Lune. D’un autre côté, le traité est directement inspiré des lois de la mer: quiconque peut naviguer dans les eaux internationales, aucun pays ne peut se les approprier, mais si vous y pêchez du poisson, il vous appartient.
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