À l’aide de formes constitutionnelles diverses sur des territoires entiers sur plusieurs continents et océans, la France garde un contrôle sur les zones de son passé colonial par une présence militaire, l’emploi du français et une influence culturelle. Peut-on maintenir son passé colonial et régler les problèmes liés au racisme?
L’impression que l’après-Mai 68 constitua un âge d’or pour la gauche tient en partie de l’illusion rétrospective puisqu’en France, la droite a occupé le pouvoir sans discontinuer pendant toute cette période, écrit le professeur de sociologie à l’université de Bordeaux, Razmig Keucheyan dans le Monde diplomatique de mars. Le racisme, dont on présente la recrudescence comme le symptôme d’une «droitisation» de la société actuelle, ne s’est pas aggravé. Bien qu’il ait changé de forme, la société française des années 1960 et 1970 n’était pas moins raciste que l’actuelle, poursuit-il. Ainsi, depuis la création de l’Organisation des Nations unies (ONU) pour mettre fin au colonialisme, ni le contexte des trente glorieuses, ni l’allégeance politique n’ont altéré le racisme de la société française qui influe sur les politiques.
Selon le quotidien catalan La Vanguardia du 30 mars, 2,6 millions de personnes vivent dans les départements et territoires outremer, dont 1,2 million sont des mineurs. Cette France ultramarine s’étend de l’Amérique du Nord par l’enclave de Saint-Pierre et Miquelon jusqu’aux Antilles, à l’Amérique du Sud avec la Guyane, à l’océan Indien par deux îles et un archipel, ainsi que dans le Pacifique avec la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie, en plus d’autres îles dans les territoires antarctiques.
Ce vaste «empire» ultramarin place la France derrière les États-Unis, mais devant l’Australie, au second rang des pays qui possèdent des zones économiques exclusives dans les mers et les océans. Au total, cela représente 11 millions de km2 à exploiter. Il s’agit d’une gigantesque réserve de ressources sous-marines, minières, d’hydrocarbures, de pêches et d’autres activités économiques en lien avec la mer.
L’administration de ce patrimoine présente un coût considérable, qu’il y ait des habitants ou non. Les lieux inhabités exigent une surveillance régulière afin d’affirmer la souveraineté du territoire face aux autres pays. La marine française doit veiller à ce qu’il n’y ait pas d’exploitation illégale des ressources, de la piraterie, du trafic de drogue et d’immigration clandestine.
Les territoires ultramarins nécessitent la présence permanente de milliers de militaires nommés «forces de souveraineté». À ce groupe, s’ajoutent les soldats français responsables d’effectuer des opérations en Afrique et au Moyen-Orient. La plus importante se déroule au Sahel, en Mauritanie, au Mali, au Burkina Faso, au Niger et au Tchad avec l’objectif de freiner l’expansion du groupe djihadiste dans la zone. Les Français ont aussi des bases au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Gabon, au Djibouti et aux Émirats arabes unis.
La «grandeur» postcoloniale est bien connue en France, qu’on l’ait étudiée à l’école ou qu’on ait des connaissances qui s’y trouvent pour le travail, sans oublier les destinations touristiques que cette zone comprend. Les chaînes de télévision présentent régulièrement des documentaires sur ces territoires et les problèmes qui y surviennent sont couverts par les médias.
Bisbille coloniale
En distribuant gratuitement dans les polyvalentes et les universités de la Nouvelle-Zélande de 430 exemplaires du livre Conquistador Puzzle Trail de l’auteur néo-zélandais Winston Cowie publié en 2015, qui suppose la découverte des îles par des marins espagnols, l’ambassade d’Espagne a semé la controverse par rapport à l’historiographie nationale, rapporte le quotidien espagnol El Pais le 28 mars. Selon la version officielle, le Hollandais Abel Tasman est le premier à avoir accosté à cette terre éloignée en 1642.
Le texte a été traduit en espagnol par l’Agence espagnole de coopération internationale au développement (AECID), à la demande du chargé d’affaires et du commerce de l’ambassade en Nouvelle-Zélande, Vicente Mas Taladriz. «Le livre a provoqué un bon débat et pas seulement dans le monde académique», a affirmé le diplomate.
Au-delà des indices mentionnés dans l’ouvrage, il y a d’autres pistes. La bouture d’un arbre gigantesque aurait été importée depuis la côte est de l’Amérique. Le casque d’un soldat espagnol et des épaves portugaises ont été découverts. Ainsi que des légendes et des traits physiques chez les autochtones maoris suggèrent que les Espagnols et les Portugais auraient conquis le territoire entre 1521 et 1578.
Que le pouvoir de la France s’étende au-delà de son État ou qu’un ambassadeur espagnol organise une offensive contre l’histoire officielle d’une ex-colonie britannique démontre que le colonialisme n’est pas chose du passé… pas plus que ne l’est le racisme qu’il génère.
https://www.pieuvre.ca/2018/03/14/meurtre-dun-journaliste-en-slovaquie-le-premier-ministre-pret-a-demissionner/