Le sexe et la politique sont-ils les deux côtés d’une même médaille? La quête de pouvoir et la relation de domination au coeur du processus électoral et gouvernemental découlent-elles d’un désir amoureux inassouvi? Avec Les luttes fécondes, l’auteure Catherine Dorion veut brasser la cage.
Militante politique, ancienne candidate pour Option nationale, mais aussi artiste, Catherine Dorion n’a certainement pas la langue dans sa poche. Et qui sommes-nous pour le lui reprocher? Après tout, on ne peut décidément pas dire que le système politique actuel, voire la société dans son ensemble, baigne dans un océan de rectitude politique et, disons-le franchement, d’ennui. Bien entendu, il y a une marge entre « l’attrapage de chatte » à la Donald Trump et à l’aspect coincé des « bonnes convenances », mais serait-il justement possible d’explorer la marge en question?
Dans son essai vide-coeur publié chez Atelier 10, la maison d’édition du magazine Nouveau Projet, Mme Dorion injecte des parcelles de sa vie personnelle dans le grand bouillon de la structure sociétale. Partisane d’un amour libre et consentant, d’une structure familiale pouvant dépasser le binôme et la monogamie traditionnels, elle s’en prend vivement au statu quo, ce grand fleuve tranquille (et passablement ennuyant, voire nocif) dans lequel baigne tristement la société québécoise.
Plutôt que de qualifier les Québécois de gens « n’aimant pas la chicane », peut-on prendre le risque de se tromper? Ce printemps érable, ce grand chambardement social et politique ayant fini par dépasser le simple cadre éducatif et la question des frais de scolarité, était-il vraiment une « crise sociale », comme se sont évertués à dire nombre de politiciens et commentateurs? Et si les « vraies affaires » étaient la soif de vivre, le désir de changement et l’envie de découverte, plutôt que l’économie, les impôts et la possibilité de prendre son char pour aller se perdre dans le trafic avant d’aller stationner dans une mer de béton pour prendre place dans un amphithéâtre neuf et vide de sens (et d’équipe de hockey)?
Voilà certainement le message de cet essai un peu échevelé, mais résolument vivant: il faut essayer, questionner, transformer, changer, débattre et foncer. Car pour éviter l’immobilisme, l’assèchement et finalement la mort, il faut vouloir vivre, hurler, gigoter dans tous les sens. Baiser, aussi. Profiter de cette passion qui nous anime entre deux séances tristounettes de métro-boulot-dodo. Cet appel primal, Catherine Dorion l’inscrit en toutes lettres dans ce manifeste à la couverture rouge artériel. Comme le sang qui est parfois furieusement pompé dans nos veines.