Cassandre Chatonnier
J’avais eu la chance, en 2014, d’assister à la présentation publique de la recherche de Menka Nagrani dans le cadre de la maîtrise en théâtre à l’Université du Québec à Montréal. En se servant d’extraits de la pièce Le chemin des passes dangereuses de Michel Bouchard comme support, elle explorait comment certains rapports relationnels entre les personnages pouvaient être exprimés via la gigue traditionnelle. Je me souviens d’avoir été agréablement surprise, et c’est pourquoi je suis allée découvrir vendredi soir, l’ensemble de la pièce à la maison de la culture Frontenac, ainsi que l’évolution de la démarche.
Car la démarche de Menka est riche. Se questionnant sur ce qu’il reste aujourd’hui de la danse traditionnelle québécoise dans un contexte de mondialisation, elle permet à la gigue de se faire peau neuve, et démontre que tout son potentiel expressif et narratif est encore présent. Dans la pièce, trois frères venant d’avoir un accident de camion se racontent, règlent leurs comptes, s’affrontent. Loin de toute esthétique réaliste, les trois hommes parlent, et les trois hommes dansent. Ils dansent leurs rancunes, leur amour, tapent et retapent encore des pieds leur colère, tournoient pour s’affronter. Une présence des corps à la fois forte, masculine, et emplie de tendresse. La performance de Felix Monette-Dubeau, Arnaud Gloutnez, et Dominic St-Laurent, est des plus impressionnantes compte tenu que ce sont des acteurs ayant appris la gigue spécialement pour ce spectacle.
L’ensemble de la production est bonne donc, le geste, la danse et la gigue s’associant très bien à la puissante histoire de Michel Marc Bouchard. Petit bémol peut être au niveau de la scénographie, trop décorative et sous utilisée, et de l’éclairage, qui semblait ne pas être toujours en connexion avec le développement dramaturgique.
Pour ceux et celles qui souhaitent découvrir de nouvelles démarches en terme de danse-théâtre, je recommande vivement ce spectacle qui commence maintenant sa tournée et qui sera prochainement présenté à Gaspé, Rimouski, Roberval, Alma, et Dolbeau-Mistassini.