Les firmes de gestion immobilières seraient les principales responsables de la hausse des loyers dans le Grand Toronto, une région où les prix des logements sont déjà parmi les plus élevés au pays.
Cette conclusion découle d’une nouvelle étude réalisée par des chercheurs de l’Université de Waterloo, selon laquelle les prix exigés par ces firmes sont, en moyenne, 44% plus élevés que dans d’autres logements de quartiers similaires, ce qui équivaut à un paiement supplémentaire d’environ 670$, chaque mois.
Dans le cadre de ces travaux, publiés dans Environment and Planning A: Economy and Space, les autrices, la Dre Martine August de la faculté de l’environnement, et la candidate au doctorat Cloé Saint-Hilaire, ont souligné qu’« il est notoirement difficile d’obtenir des informations sur les logements, à Toronto », et qu’elles sont les premières, au pays, à prouver que les compagnies immobilières sont responsables des hausses de loyers.
Les deux chercheuses ont aussi constaté que ces augmentations ont été plus marquées dans les quartiers abritant principalement des habitations à loyers modiques et des populations racisées.
L’étude rappelle également que la transformation du milieu, avec de plus en plus de propriétés passant aux mains de compagnies, plutôt que de demeurer la possession de « petits » propriétaires, ainsi que l’utilisation de l’immobilier comme secteur d’investissement, a entraîné une diminution de l’abordabilité, contribuant d’autant à la crise du logement.
Et si l’étude se concentre sur Toronto, les compagnies impliquées dans la région possèdent des propriétés à la grandeur du pays.
« La plupart des gens ne peuvent pas se permettre le loyer de l’endroit où ils habitent, et ces compagnies sont en partie responsables pour ce changement », soutient la Dre August. « Elles achètent des bâtiments et les transforment en produits d’investissement, ce qui fait grimper les prix et rend les communautés moins abordables pour les citoyens. »
Des informations cachées
Jusqu’à maintenant, personne n’avait pu prouver que la financiarisation de l’immobilier accélérait la hausse des loyers. Les chercheuses disent avoir utilisé une base de données unique s’appuyant sur diverses sources pour examiner les loyers, à Toronto, en fonction des propriétés, des propriétaires et des types de propriétaires.
« Nous avons besoin de données plus transparentes et accessibles. Nous avons dû payer pour obtenir accès à une base de données privées et télécharger les informations sur une base trimestrielle, puisque rien n’est archivé », a mentionné Cloé St-Hilaire. « Améliorer la transparence des bases de données pourrait accroître la capacité des gens à déterminer qui possède un immeuble à logements et savoir combien ils réclament, à quel point ils augmentent leur prix, et s’ils expulsent des locataires. »
Toujours selon les deux autrices, leurs conclusions s’inscrivent en droite ligne des recommandations de groupes communautaires, qui souhaitent mieux contrôler ces compagnies.
Les nombreuses solutions possibles, affirment ces groupes, impliquent de réglementer le marché locatif, de renforcer les protections offertes aux locataires, et de construire davantage de logements sociaux – des solutions qui viendraient soutenir les locataires et améliorer l’égalité immobilière, sans égard au type de propriétaire.
« Le gouvernement s’est donné des objectifs pour accroître l’abordabilité des logements, mais ses programmes financent des organisations qui détruisent l’accès à des loyers abordables », a déploré la Dre August.
« Nous pensons que [ces programmes] devraient avoir accès à du financement de la part de la Société canadienne d’habitation et de logement, ou encore de la Stratégie nationale sur le logement. »