L’Apocalypse est à nos portes, et la fin du monde prendra des allures de… vieilles versions de Donjons & Dragons, de métal des années 1980 et 1990, et d’un reptile géant cracheur de feu? Huit mois après Changes, les gars de King Gizzard and the Lizard Wizard lancent un nouvel album qui laisse de côté les arrangements sympathiques pour plutôt donner dans le speed metal et l’hommage à Motörhead et consorts.
Prosaïquement intitulé PetroDragonic Apocalypse, ou, pour les gens qui ont beaucoup de souffle, Dawn of Eternal Night: An Annihilation of Planet Earth and the Beginning of Merciless Damnation (excusez du peu!), ce nouveau disque est ainsi l’occasion, pour nos larrons australiens, de revisiter le métal pur et dur, dans un genre de suite d’Infest the Rat’s Nest, ce disque sorti en 2019.
Déjà, à l’époque, le groupe évoquait des thèmes s’articulant autour de la fin de notre civilisation: Mars for the Rich, à propos de ces milliardaires semblant vouloir fuir notre monde pour aller se cacher sur la planète voisine; Superbug, une chanson tombée à pic, un an avant la pandémie; Self-Immolate; la bien nommée Hell, etc.
Cette fois, donc, on mêle allègrement monde fantastique et univers saturé en émissions de CO2 et vapeurs de pétrole. Même le titre de la première pièce, Motor Spirit, évoque non seulement les grosses cylindrées, celles qui bouffent de l’or noir comme d’autres bouffent leur nombre recommandé de portions de fruits et légumes, mais s’avère aussi être un mantra, un chant qui vient ouvrir et clore ce sombre chapitre de l’odyssée musicale de KGLW.
C’est cette convergence des genres, d’ailleurs, qui perdure tout au long de cet album concept. Concept, oui, mais pas seulement: nous ne sommes pas, ici, dans un album-fleuve, comme pouvait l’être le fantastique Nonagon Infinity, mais il s’en faudrait de peu pour que les choses fonctionnent ainsi et que l’on puisse écouter PetroDragonic Apocalypse d’un trait, et se rendre compte que la fin de l’album coïncide avec son début.
Quoi qu’il en soit, nous y voilà: sept pièces fortes, puissantes, rapides, jouées avec la rage au coeur, des riffs de guitare endiablés et un t-shirt de son band métal préféré des années 1980/1990. En ce sens, les deux vidéoclips publiés jusqu’à maintenant par le groupe, respectivement pour Gila Monster et Dragon, témoignent de la dualité fusionnelle des deux genres mis de l’avant dans l’album.
Les deux titres sont résolument métal, mais le premier met en scène des sorciers qui prient pour l’apparition d’un monstre à écailles, le tout sur fond de paysage forestier et montagneux digne d’un film de série B des années 1980, à la Conan the Barbarian ou Deathstalker.
Le deuxième, lui, parle également d’un Dragon (c’est évidemment le titre de la chanson), mais tout y est présenté comme étant tout droit sorti de la décennie suivante, avec des effets visuels dignes des groupes hard rock et métal alternatifs de cette époque. Images délavées, ralentis, angles forcés… le tout s’ajoute à de longs solos de guitare, histoire de bien faire couler cet acier en fusion dans nos oreilles.
Oh, le disque ne compte aucune chanson en bat de 4 minutes 30? Et pas moins de trois pièces flirtant ou dépassant les neuf minutes? KGLW a l’habitude, depuis le temps, de nous emporter dans ces voyages musicaux, ces épopées rock où le mélomane est transporté dans un autre monde. Dans le contexte, d’ailleurs, on serait bien en peine de qualifier un disque d’odyssée et de conceptuel si l’on n’avait pas la possibilité de se noyer dans les vagues agitées du thrash et du speed metal.
Tour de force musical qui gagne en puissance à chaque écoute, PetroDragonic Apocalypse prouve que King Gizzard and the Lizard Wizard continue de gagner en maturité et en capacités mélodiques. Un album coup-de-poing qui appuie bien fort là où ça fait mal.