À l’approche de la Saint-Valentin, l’utilisation des applications de rencontre par des gens cherchant à tisser de nouveaux liens augmente. Malheureusement si des gens cherchent l’amour, des fraudeurs cherchent aussi des façons de voler leur argent.
Une équipe de l’Université d’État de la Géorgie vient de publier des travaux de recherche qui dévoilent les tactiques utilisent par les fraudeurs pour susciter la confiance chez les utilisateurs des applications, ce qui rend ces derniers vulnérables à des tentatives cybercriminelles.
Selon Volkan Topalli, professeur de justice criminelle et de criminologie, le phénomène appelé « fraude romantique » est à la fois insuffisamment signalé aux autorités et insuffisamment étudié. Les collègues du Pr Topalli et ce dernier ont fait connaître leurs conclusions dans l’American Journal of Criminal Justice.
« Nous avons cette explosion de criminalité qui se déroule en ligne. Dans le monde physique, vous pouvez peut-être frauder une ou deux personnes à la fois. Mais grâce aux réseaux sociaux et à la technologie, un fraudeur peut envoyer un courriel ou un message à des centaines de personnes à la fois, en cherchant une victime », mentionne M. Topalli.
« Les fraudeurs sont efficaces parce qu’ils sont des experts dans l’art de priver les gens de leur argent, en plus d’être particulièrement doués lorsque vient le temps d’identifier une cible vulnérable. »
Un rapport sur la cybercriminalité publié en 2021 par le FBI indique que les fraudes romantiques en ligne se sont multipliées au cours des dernières années, pour atteindre un total de près de 956 millions de dollars dérobés par an. Cela en ferait le troisième plus important cybercrime en termes d’ampleur des pertes.
Fangzhou Wang, la principale autrice de l’étude, précise que l’objectif des travaux consistait à identifier les les facteurs de risque et les mesures de protection pour ceux qui sont ciblés par ce type de fraude, afin de dévelo;per un modèle de vulnérabilité et de résilience des victimes.
« Nous voulions déterminer ce que les fraudeurs accomplissaient de façon si efficace, le tout pour établir des stratégies que les internautes peuvent adopter pour se protéger », dit-elle.
Les chercheurs ont amassé des données à partir de témoignages publiés en ligne sur des sites où les victimes partagent leur histoire et mettent d’autres internautes en garde. Au total, près de 10 000 de ces témoignages ont été examinés.
Parmi les personnes ciblées par les fraudeurs, on compte des utilisateurs de Facebook et Twitter, mais aussi des abonnés à des sites et des applications de rencontre, comme Tinder, Ashley Madison et OkCupid.
Plusieurs outils à la disposition des fraudeurs
Les spécialistes ont identifié une série de techniques de fraude qui étaient davantage répandues, ainsi que les méthodes les plus efficaces. Ainsi, les voleurs numériques avaient parfois recours à des déclencheurs émotionnels poignants, créaient des crises de toute pièce, profitaient de l’attirance éprouvée par les victimes, ou faisaient encore appel au sentiment de culpabilité des internautes.
Entre autres signaux d’alarme, on note des « séducteurs » ou « séductrices » refusant de parler au téléphone, ou encore d’envoyer des photos récentes. Bien sûr, l’indicateur d’une tentative de fraude le plus évident était le fait que quelqu’un demande à un internaute de leur donner de l’argent.
Les chercheurs ont aussi identifié des facteurs de risque répandus, comme le manque de connaissances en technologie, ce qui est souvent le cas chez les personnes plus âgées. Mais cette vulnérabilité est aussi présente chez les jeunes, estiment les auteurs de l’étude, puisqu’ils pourraient être trop confiants, ou manquer d’expérience lorsque vient le temps d’entamer une relation en ligne. Sans surprise, d’autres victimes de choix sont les gens qui ont traversé des moments difficiles dans leur couple et qui recherche simple un ou une compagnon.
Au dire de l’équipe responsable de l’étude, il est fort probable que le nombre de ces fraudes romantiques soit largement sous-représenté, en tenant compte du fait que les victimes ont souvent honte, voire qu’elles n’acceptent même pas les preuves indiquant qu’elles ont été arnaquées.
« Il y a bien des gens qui disent « non, j’aime cette personne, vous vous trompez », et ils vont poursuivre la relation. C’est difficile à entendre », mentionne le Pr Topalli.
Pour Mme Wang, puisque les fraudeurs tendent à utiliser les mêmes indicateurs langagiers pour arnaquer leurs victimes, les fournisseurs d’accès internet pourraient développer des outils de prédiction basés sur des algorithmes pour détecter les tentatives de fraude, algorithmes qui pourraient ensuite être intégrés au sein des applications et services de rencontre.
Les chercheurs indiquent encore que ce genre de fraude peut non seulement entraîner des pertes financières, mais aussi provoquer d’importants traumatismes psychologiques. En fait, l’étude démontre que ces victimes vivent un choc psychologique similaire à celui encaissé par les victimes de violence domestique.