Dans les rues constamment animées de New York, les ambulanciers battent le pavé, toujours en action pour sauver des vies, aussi misérables soient-elles. Adapté du roman du même nom, Black Flies, réalisé par Jean-Stéphane Sauvaire, frappe comme une tonne de briques.
Aussi appelé Asphalt City, ce long-métrage ayant été projeté en première à Cannes, l’an dernier, met en vedette Tye Sheridan dans le rôle de Cross, un jeune ambulancier souhaitant devenir médecin, mais qui se retrouve pour l’instant dans les « tranchées » du système de santé new-yorkais.
Rapidement appelé à travailler avec « Rut », un vieux de la vieille joué par un Sean Penn désabusé, Cross verra ses illusions être fracassées, les unes après les autres, au sein d’un système qui semble absolument vouloir broyer les intervenants de première ligne. D’un côté, les patients particulièrement maganés qui insultent les soignants; de l’autre, les patrons qui exigent respect et obéissance, parfois sans égard aux circonstances spécifiques d’une situation.
Tout cela, sans surprise, mènera à une dégradation de la santé mentale de notre protagoniste, jusqu’à une certaine intervention qui passera bien près de « briser » notre héros.
Avec une excellente maîtrise des codes cinématographiques, qui lui permet de créer une ambiance étouffante, que ce soit à bord de l’ambulance, ou entre deux quarts de travail, lorsque notre personnage principal semble errer dans la ville, en quête de sens, Jean-Stéphane Sauvaire propose un long métrage très solide sur le plan de la technique.
Là où le bât blesse, c’est que le personnage de Cross sert très largement de tableau vierge sur lequel les autres individus viendront peindre un tableau chaotique. Le procédé n’est certainement pas nouveau, mais on se prend, à plusieurs reprises, à espérer que Tye Sheridan, qui n’en est pourtant pas à son premier film, affiche une émotion autre que le simple fait de regarder dans le vide, alors que son monde s’écroule lentement.
De fait, tous les personnages secondaires, que ce soit d’autres ambulanciers, son patron (un étrange Mike Tyson), sa courte fréquentation, ou encore les patients, sont plus expressifs que lui… Et sont donc plus intéressants que lui.
Et même lorsque le barrage de l’impassibilité finit par céder, on se demande pourquoi notre héros s’entête à garder ses émotions pour lui, alors qu’il est clairement possible d’aller chercher de l’aide. Après tout, le service d’ambulance de New York n’est certainement pas toxique au point de ne pas recommander un suivi psychologique pour aider ses employés à faire face à l’horreur, jour après jour…
Bref, si le film est une solide proposition sur le plan technique, Black Flies (ou Asphalt City) aurait eu besoin de quelque chose en plus, d’un personnage principal plus humain, plus impliqué, plus vrai, afin de rendre le film mémorable.