Pourtant, l’idée n’était pas foncièrement mauvaise: dans un Québec nouvellement indépendant, le gouvernement décide de réduire largement les frais du système de santé en réduisant graduellement les soins offerts aux plus âgés et aux gens souffrant de maladies chroniques. Horrifiée, une conseillère prends la fuite pour lancer L’alerte.
Écrit par Brigitte Alepin, professeure en fiscalité à l’Université du Québec en Outaouais, le roman nous décrit donc un Québec, dans les années 2030, qui aurait complété son indépendance. Pour assurer la prospérité du nouveau pays, nous dit-on, la nation est transformée en paradis fiscal.
Sauf que, bien entendu, se priver de revenus pèse lourd dans la balance lorsque vient le temps d’équilibrer un budget. Et cela nous mène au problème au coeur du scénario: cette idée de « laisser mourir » ceux qui sont trop vieux, ou trop malades, parce que la Santé, ça coûte cher. Trop cher.
Si l’on peut certainement sentir, dans les écrits de Mme Alepin, une véritable soif de justice sociale, et surtout une envie d’en découdre avec les riches qui s’en mettent plein les poches, plutôt que de contribuer au bien-être de la société, il ne suffit pas d’être animé(e) de bons sentiments pour pouvoir écrire un roman qui se tient.
En fait, dans L’alerte, les choses sont soit peu ou pas expliquées, soit n’ont guère de sens: pourquoi les Québécois ne peuvent-ils plus quitter leur pays, sauf s’ils disposent d’un billet d’avion de retour? Qu’en est-il des frontières terrestres? Pourquoi l’héroïne doit-elle impérativement changer de pays afin de prévenir le monde? Internet et les médias n’existent plus? Comment peut-on honnêtement convaincre une population d’adopter un modèle économique qui entraînera forcément une chute draconienne des revenus de l’État?
En plus de tous ces problèmes scénaristiques, les personnages de L’alerte sont généralement tristement unidimensionnels: du méchant président décidé à mener à un « génocide » au père de l’héroïne qui lance une attaque au drone contre le chef de l’État pour permettre à sa fille de prendre la fuite, en passant par notre personnage principal, impossible de trouver ces petits plus, ces indications qui font en sorte que les gens ont l’air « vivants », plutôt que d’être des robots chargés de réciter du texte.
Avant même de terminer notre lecture, on fermera donc les pages de cette Alerte, un roman tristement incomplet s’articulant autour d’une idée bancale. C’est bien dommage!