L’adoption du projet de loi C-18 par le Parlement canadien, devenu depuis la Loi sur les nouvelles en ligne, et le blocage subséquent des nouvelles sur les plateformes de Meta – Facebook et Instagram – n’a pas semblé entamer l’intérêt pour ces mêmes plateformes, ainsi que pour Google, une autre compagnie opposée à Ottawa dans ce dossier, lorsque vient le temps de s’informer.
Selon un nouveau sondage réalisé par la firme CROP pour le Centre d’études sur les médias de l’Université Laval, c’est plus de la moitié des Québécois adultes qui consultent ainsi Google (57 %) et Facebook (53 %) pour se tenir au courant des derniers événements survenus dans l’actualité, le tout à une fréquence quotidienne, au minimum.
Lorsque l’on ajoute les répondants qui consultent ces mêmes plateformes au moins plusieurs fois par semaine, on obtient un total de 82 % des participants qui se tournent vers Google, et 69 % qui vont plutôt chez Facebook (les personnes interrogées pouvaient choisir plus d’une réponse).
À l’opposé, à peine le tiers des répondants visitent quotidiennement les sites internet ou les applications des médias d’information, comme La Presse, Radio-Canada, la Montreal Gazette, etc. Soit environ la même proportion que les gens qui se tournent vers d’autres sources numériques comme l’application TikTok, le logiciel de clavardage Messenger (qui appartient à Meta, la maison mère de Facebook).
Un autre logiciel appartenant à cette même entreprise, Instagram, sert de porte d’entrée quotidienne vers les nouvelles pour un peu moins d’un Québécois adulte sur cinq (22 %). Twitter ferme ensuite la marche, avec 10 % d’utilisateurs quotidiens qui y trouvent leur dose d’actualités.
Plus d’un mois après le début du blocage des nouvelles de nombreux médias canadiens (et internationaux) sur ses plateformes Facebook et Instagram (même si l’intégration de liens vers des sites de nouvelles fonctionne toujours dans Messenger), ces deux plateformes appartenant à Meta demeurent donc particulièrement populaires chez les internautes d’ici, une possible indication que les habitudes des utilisateurs du web sont difficiles à changer.
Ces habitudes semblent d’ailleurs être particulièrement inamovibles pour les plus jeunes adultes, soit les 18 à 34 ans: toujours selon le sondage, les deux tiers des membres de ce groupe d’âge (66 %) considèrent que Facebook et Instagram représentent des « sources assez importantes », voire « très importantes » lorsque vient le temps de consulter les nouvelles.
Cette proportion est légèrement moindre chez les 35 à 54 ans (53 %), avant de chuter pour ne représenter qu’environ une personne sur quatre (26 %) chez les 55 ans et plus.
Malgré cet immobilisme apparent, les deux tiers des participants au coup de sonde (66 %) ont remarqué le blocage des publications d’articles et de liens vers des sites d’actualité. Mais si le blocage a bel et bien été constaté, à peine le tiers des répondants indiquent que celui-ci affecte « assez » ou « beaucoup » leur consommation de contenus d’actualité.
Changements à venir?
Si le coup de sonde n’a pas porté sur le type de contenus d’actualité consulté par les personnes interrogées – il pourrait être légitime de se demander ce que ces internautes consomment, comme nouvelles, maintenant que la quasi-totalité d’entre elles a bel et bien disparu des plateformes de Meta –, l’enquête révèle toutefois qu’environ le tiers des répondants (29 %) ont modifié leurs habitudes en la matière depuis l’entrée en vigueur du blocage sur Facebook et Instagram.
Cependant, environ une personne sur cinq (18 %) n’a rien changé à sa routine médiatique, tandis que la même proportion (20 %) précise qu’elle pourrait apporter des changements si la situation persiste.
C’est encore une fois chez les plus jeunes (18-34 ans) que l’on semble trouver la réticence la plus forte envers le changement d’habitudes: 30 % des répondants de ce groupe n’ont pas modifié leur routine médiatique, alors que 21 % pourraient changer leurs méthodes pour s’informer, le cas échéant.
Il existe toutefois peut-être une lueur d’espoir pour les partisans de la Loi sur les nouvelles en ligne, qui exige que les plateformes numériques s’entendent avec les médias pour convenir d’une compensation juste pour la diffusion de leurs contenus via les services en ligne: près de la moitié des répondants (48 %) sont d’avis que Facebook et Instagram devraient bel et bien compenser les médias, contre 24 % qui sont d’avis contraire.
Et la moitié des participants jugent aussi que Meta et les médias devraient s’entendre pour déterminer le montant de cette compensation, contre 34 % qui estiment que ce rôle reviendrait au gouvernement fédéral.
Si la Loi sur les nouvelles en ligne a été adoptée au Parlement, elle n’entrera en vigueur qu’en décembre prochain.