Mythologie chinoise, arts martiaux et réalité des immigrants sino-américains font bon ménage dans Kung Fu, un remake de la série télévisée du même nom des années 1970 et disponible depuis peu en Blu-ray et DVD.
Habitant la ville de San Francisco avec sa famille, Nicky Shen, une Sino-Américaine dans la vingtaine, poursuit des études pour devenir avocate. Dans l’espoir qu’elle renoue avec ses racines et surtout, qu’elle délaisse son copain caucasien et se trouve un mari asiatique, sa mère l’incite à effectuer un voyage en Chine. De passage dans la province de Yunnan, Nicky découvre un ancien monastère Shaolin, et sous la direction de Pei-Ling, son « shifu », elle y passe trois années à s’entraîner intensivement afin de maîtriser l’art ancien du Kung fu.
Un soir, le monastère est attaqué et incendié par un groupe de ninjas. Une femme, nommée Zhilan, tue son mentor devant ses yeux et vole une épée rayonnant d’une étrange lueur verte. Dans son dernier souffle, Pei-Ling lui demande de la récupérer. Au fil de ses recherches, la jeune femme découvre que le glaive en question fait partie d’un assortiment de huit armes magiques fabriquées par un shaman il y a des siècles, et que quiconque les réunira aura à sa disposition une énergie si puissante qu’elle pourrait provoquer la fin du monde. Nicky entamera alors une dangereuse mission pour mettre la main sur l’arsenal mystique avant la meurtrière.

Contrairement à l’émission du même nom de 1972 qui mettait en vedette David Carradine, un acteur blanc, dans le rôle d’un moine Shaolin, Kung Fu délaisse le « whitewashing » en faveur d’une distribution composée presque exclusivement d’acteurs asiatiques. L’intrigue de la série puise dans la mythologie chinoise, et explore le quotidien des Sino-Américains qui tentent de préserver leurs traditions tout en s’adaptant aux coutumes de leur pays d’adoption. En dehors de sa quête, Nicky Shen viendra souvent en aide aux membres de sa communauté, qu’il s’agisse de gangsters terrorisant les commerçants du Chinatown ou d’un jeune asiatique accusé à tort de meurtre.
Au-delà de sa dimension fantastique, qui se traduit par des armes magiques et une héroïne ayant des visions de son mentor décédé, Kung Fu a également des airs de téléroman et s’attarde beaucoup aux problèmes familiaux de Nicky Shen, qui doit composer avec le « coming out » de son frère gay, le mariage prochain de sa sœur, sa mère autoritaire qui n’est pas particulièrement heureuse de retrouver une fille qui lui a désobéi, et un triangle amoureux entre elle, son ex qui travaille comme procureur de district, et Henry, un étudiant en Histoire chinoise qui l’aidera dans sa mission. La série est davantage axée sur le drame humain que l’action, et il n’y a habituellement qu’une seule bataille par épisode.

Le vétéran Tzi Ma, que l’on a pu voir dans des tonnes de productions du petit écran comme Veep, The Man in the High Castle ou 24, interprète le père de Nicky Shen, et Kheng Hua Tan joue habilement sur les clichés de la mère chinoise contrôlante et tyrannique, mais au bon cœur. Tenant le rôle principal, Olivia Liang semble frêle et réservée de prime abord, mais se déchaîne avec beaucoup de grâce lors des scènes de combat. Eddie Liu (Henry Yan) est très charismatique dans le rôle de l’étudiant qui aidera la jeune héroïne dans sa quête, et Yvonne Chapman (Zhilan) campe une vilaine d’envergure, affichant une attitude déterminée et décochant des regards remplis de haine qui donnent froid dans le dos.
Très cosmopolite, l’intrigue de Kung Fu prend place aux quatre coins du globe, du Chinatown de San Francisco à Singapour, en passant par Taipei, Las Vegas, Pékin, San Cristobal ou Nash Creek en Colombie-Britannique, et la cinématographie tire profit de ces paysages variés pour insérer de belles images à travers le montage, comme le Golden Bridge noyé dans la brume ou le magnifique monastère niché au pied des montagnes. Les combats sont impeccablement chorégraphiés, et à l’image de Crouching Dragon, Hidden Tiger, défient souvent la gravité. Certaines séquences racontant la mythologie antique de la Chine sont réalisées en animation. Signe de respect, plusieurs dialogues se déroulent en Cantonnais ou en Mandarin avec des sous-titres, ce qui est plus crédible que des Chinois parlant anglais entre eux.

Le coffret haute définition de Kung Fu: The Complete First Season comprend les treize épisodes de quarante-deux minutes chacun sur trois disques au format Blu-ray, et inclut également un code donnant accès à la version numérique. Seize scènes retirées du montage, ainsi qu’un Making Of d’une quinzaine de minutes où les acteurs principaux et Christina M. Kim et Bob Berens (les deux « showrunners » de la série), parlent de la relation entre Nicky et son mentor et de la quête de la jeune fille, une immigrante de deuxième génération qui renoue avec l’héritage familial et l’histoire de son pays d’origine, constituent l’essentiel du matériel supplémentaire.
Comme le prouve le succès des films de Bruce Lee ou plus récemment de Shang-Chi and the Legend of the Ten Rings, les arts martiaux ont toujours fasciné les occidentaux, mais loin de se limiter à une succession de scènes d’action, la série Kung Fu constitue une excellente façon de s’initier au quotidien des immigrants sino-américains.
6.5/10
Kung Fu: The Complete First Season
Réalisation: Joe Menendez, Hanelle M. Culpepper, Michael Choi, Dan Liu, Viet Nguyen, Geoffrey Wing Shotz, Richard Speight Jr., Sudz Sutherland, R.T. Thorne, America Young
Scénario: Christina M. Kim, John Bring, Linda Ge, Dan Hamamura, Richard Lowe, Melissa Rundle, Robert Berens, Ryan Johnson, Peter Lalayanis, A.C. Allen, Kathryn Borel, Michael Deigh, Lilian Yu (d’après la série crée par Ed Spielman et Harman Miller)
Avec: Olivia Liang, Shannon Dang, Vanessa Kai, Kheng Hua Tan, Eddie Liu, Jon Prasida et Gavin Stenhouse
Durée: 549 minutes
Format : Blu-ray (+ copie numérique)
Langue : Anglais seulement