Plusieurs études ont démontré que la pauvreté nuit à la participation électorale. Pour la première fois, Max Schaub, un chercheur associé au Berlin Social Science Center, s’est penché sur l’influence des graves problèmes financiers sur la participation au processus électoral – des situations qui ne durent souvent que quelques jours, et lors desquelles l’argent manque à un point tel qu’il est impossible de répondre aux besoins de base.
Ces situations, vécues principalement par les personnes vivant sous le seuil de la pauvreté, représentent environ 16% des gens vivant en Allemagne, soit les chômeurs, les retraités avec une petite pension, ainsi que les parents célibataires. Ces groupes ont souvent un budget mensuel qui est dépensé jusqu’au dernier euro. Des circonstances exceptionnelles feront en sorte qu’ils plongeront immédiatement dans le rouge.
De telles contraintes financières sont accompagnées par une forte réduction de la participation politique les jours d’élection, a constaté l’auteur de l’étude. Plus précisément, les intentions de vote chez les pauvres chutent de 5 points de pourcentage. En termes absolus, cela signifie que 500 000 votes en moins ont été déposés dans des urnes lors des plus récentes élections fédérales allemandes.
Le taux de participation a lui aussi reculé de 5 points de pourcentage comparativement à des élections tenues lorsque les électeurs pauvres vivaient moins de pression financière. Cet effet s’est maintenu au cours des dernières décennies, et est particulièrement prononcé dans le cadre des élections locales et régionales (-6 points) et un peu moins marqué lors des élections fédérales (-4 points).
« Les urgences à court terme peuvent transformer des gens en non-électeurs », affirme M. Schaub. Cela est imputable à des niveaux de stress plus élevés et à un sentiment d’aliénation par rapport au processus politique, qui privent tous deux ceux qui sont touchés de leur désir de participer.
De plus, pour économiser de l’argent, la seule option est souvent de se retirer dans la sphère privée. Cela réduit l’inclusion sociale, ce qui est un important facteur de la participation politique.
« Pour s’assurer que tous les segments de la population sont représentés, nous devrions éviter de prévoir des élections lors des jours où des groupes de gens souffrent de manque d’argent », explique M. Schaub.
L’étude a porté sur le taux de participation de plus de 1000 élections aux paliers fédéral, régional et local en Allemagne, depuis 1946. Les travaux combinent des données de plusieurs sondages à grande échelle et des entrevues avec des personnes vivant dans la pauvreté.
Et pour déterminer les conséquences des difficultés financières à court terme, l’étude s’appuie sur les conventions allemandes en matière de paiements. Dans ce pays, les salaires, les pensions et les prestations de chômage sont versés à la fin du mois, au même moment où d’importants paiements doivent aussi être effectués. Puisque les banques ne transfèrent pas d’argent la fin de semaine, les mois au cours desquels la dernière journée coïncide avec un weekend, ces paiements doivent être complétés plus tôt dans le mois.
Comme le démontre l’étude, cette situation fait en sorte que les gens aux prises avec la pauvreté doivent surmonter des difficultés financières supplémentaires, ce qui affecte la participation politique de façon négative.