Des astronomes ont identifié l’emplacement des composantes chimiques se trouvant à l’intérieur des « couveuses » de planètes, et ce, à un extraordinaire niveau de détail. Ces nouvelles informations ont permis de révéler l’emplacement de dizaines de molécules situées à l’intérieur de cinq disques protoplanétaires – des régions formées de gaz et de poussières en orbite autour de jeunes étoiles, et qui finissent par donner naissance à des planètes.
« Ces disques de création planétaire débordent de molécules organiques, dont certaines sont impliquées dans le processus de création de la vie sur Terre », explique Karin Öberg, une astronome du Center for Astrophysics, lié à l’Université Harvard et au musée Smithsonian, qui a dirigé le projet de cartographie stellaire. « C’est vraiment excitant; les produits chimiques dans chaque disque auront ultimement un effet sur le type de planète qui se formera – et détermineront si ces planètes peuvent abriter la vie. »
Une série de 20 études détaillant le projet ont été publiées la semaine dernière sous l’acronyme MAPS. Ces travaux doivent aussi paraître dans les pages de l’Astrophysical Journal Supplement.
La formation de planètes dans diverses « soupes »
Les nouvelles cartes des disques révèlent que les composantes chimiques contenues dans les disques protoplanétaires ne sont pas réparties de façon uniforme à travers ces disques; en fait, chaque disque est une « soupe » différente, un mélange complexe de molécules, ou ingrédient planétaires. Les résultats des travaux portent à croire que la formation des planètes se produit dans des environnements chimiques différents, et que pendant leur formation, chaque planète peut être exposée à des molécules largement différentes en fonction de sa location au sein d’un disque.
« Notre carte révèle que l’emplacement d’une planète dans un disque, lors de sa formation, est très important », mentionne Mme Öberg, principale auteure de la première étude de la série. « Plusieurs composantes chimiques contenues dans le disque sont organiques, et leur distribution varie largement au sein d’un disque spécifique. Deux planètes peuvent se former autour d’une même étoile et posséder une série de composantes organiques très différentes, et donc ne pas avoir la même prédisposition pour faire apparaître la vie. »
De son côté, l’étudiant aux cycles supérieurs Charles Law, qui a dirigé le troisième volet de l’étude, qui a été consacré à l’emplacement spécifique de 18 molécules, dont plusieurs liées aux origines de la vie, à l’intérieur des cinq disques d’accrétion, dit avoir été surpris par le résultat de ses recherches.
Celles-ci ont d’ailleurs nécessité un disque dur de 100 téraoctets (100 000 gigaoctets d’espace) et deux ans d’analyses.
« Comprendre les réactions chimiques qui se produisent dans seulement un disque est bien plus complexe que ce que nous pensions. »
« Chaque disque individuel semble être très différent du prochain, avec son propre ensemble de sous-structures chimiques », explique M. Law. « Les planètes qui se forment dans ces disques seront soumises à des environnements chimiques très différents. »
À la recherche de nouvelles planètes
Le projet MAPS a aussi offert aux astronomes une série d’opportunités pour étudier davantage que l’environnement chimique des disques.
« Notre équipe a utilisé ces cartes pour démontrer l’endroit où se trouvent certaines planètes en formation, ce qui permet aux scientifiques de lier leurs observations des soupes chimiques à la composition future de planètes spécifiques », a encore indiqué Mme Öberg.
Les astronomes disent être sûrs du fait que les planètes se forment dans des disques d’accrétion, mais il y a un « mais »: impossible d’observer directement le phénomène. La densité des gaz et des poussières, qui formeront une couche opaque pendant quelque trois millions d’années, protège les jeunes planètes du regard des Terriens et de leurs télescopes.
Au sein des disques protoplanétaires, le gaz et les poussières orbitent naturellement autour d’une étoile centrale. La vitesse de ces matériaux, que les astronomes peuvent mesurer, devrait demeurer constate à travers le disque. Mais si une planète s’y trouve, elle pourrait déranger quelque peu le gaz qui se trouve autour de ce monde, ce qui provoquerait une déviation de la vélocité, ou affecterait le déplacement du gaz d’une façon inattendue.
Un outil devrait bientôt permettre aux astronomes d’obtenir une vision plus claire de ces planètes en formation: le télescope spatial James Webb, qui doit être lancé en orbite l’an prochain.