Bien qu’un cran plus fluide et tolérable que son prédécesseur, cet énième Spider-Man, nouvel essai purement estival histoire d’alléger les aventures des amis de la grande famille Disney Marvel, n’en demeure pas moins une proposition beaucoup trop enfantine où, lorsque remises en question, les pièces a priori amusantes ne s’emboîtent aucunement.
Spider-Man est certainement l’un des super-héros les plus populaires et, à preuve, on a beau le ramener encore et encore, sous toutes les facettes et coutures possibles, le public continue étonnamment d’en redemander. Certes, si Sam Raimi s’est un peu fourvoyé aux termes de sa trilogie après avoir atteint de jolis sommets, Marc Webb s’est injustement fait torpiller ses ambitions pour ses tentatives mésestimées.
Pourtant, si l’on a eu peur face à l’abdication de Sony devant la grande machine Disney, rajeunissant le héros pour y apporter un nouveau souffle, ils ont su nous prouver que le superhéros, contre toutes attentes, n’avait certainement pas dit ses derniers mots lorsque le splendide et magistral Spider-Man: Into the Spider-Verse a littéralement tout éclipsé sur son passage.
Histoire de nous ramener sur terre, littéralement, on retrouve l’agile Tom Holland qui, dans sa cinquième apparition dans ce rôle tant convoité, offre ici sa performance la plus nuancée jusqu’à présent. Il y apporte ainsi une profondeur mieux accueillie et une interprétation beaucoup moins cabotine et surexcitée que ce qui nous avait été proposé auparavant.
Suivant les répercussions des chapitres précédents (l’effet télévisuel oblige) on campe les grandes lignes de l’action dans une logique qui ne peut que répondre à tout ce qu’on a dû voir auparavant. Ainsi, plus concis et moins éparpillé (on a eu la bonne idée que de ne retrouver que deux des six scénaristes de la veille), cette « suite » n’est plus nécessairement celle du Spider-Man précédent, sorti pourtant il y a moins de deux ans et auquel on ne fait que bien peu référence (ayant réduit ou interchangé beaucoup de personnages), mais celle de tous les autres chapitres du MCU (Marvel Cinematic Universe), suivant la même logique imbriquée selon laquelle on nous a introduit le personnage « revampé » dans Captain America: Civil War.
L’horrible scène d’ouverture en est la preuve; celle-ci est littéralement lancée au visage du spectateur sans raison d’être ni justification, de toute façon interrompue au cœur de sa propre action, alors qu’ensuite on s’amuse à infantiliser, pardon, « alléger » tout le sérieux des plus récents Avengers.
Le « snap » de Thanos devient un « blip » et l’excuse pour toutes sortes de gags plus douteux les uns des autres. Cela devient le leitmotiv de cette parenthèse, qui malgré ses thèmes plus sérieux, dont le deuil et le sens des responsabilités (typiques du personnage), préfère tout miser sur la légèreté.
Se succèdent alors toutes sortes de situations qui vont de l’absurde au ridicule, mais qui soutirent malgré tout des sourires sincères. C’est d’ailleurs ces décisions saugrenues qui permettent de régler l’un des plus gros problèmes et de rendre le meilleur ami de Spider-Man plus tolérable en lui attribuant une contrepartie attendrissante. Ou encore de s’en remettre à l’expertise de Martin Starr et J.B. Smoove quand on a besoin d’un petit rire facile.
Un film dans l’ombre du précédent
Puisque voilà, il ne faut pas s’attendre à des gags très élaborés qui sont habituellement assez prévisibles, au même titre de l’histoire qui ne parvient pas à retrouver les beaux revirements du film précédent. Il y a peut-être que l’absence d’un acteur du calibre de Michael Keaton fait un trou considérable dans la tapisserie et que malgré son talent évident, Jake Gyllenhaal est difficilement à l’aise dans cette mascarade, surtout quand il se donne à fond dans une performance digne de Tobey Maguire en mode « crisette ».
Certes, si l’on oublie les effets spéciaux qui ne sont pas toujours agréables à regarder, on joue bien sur les lumières et les couleurs pour le rendre facilement attrayant. Et retrouver un monteur vétéran des Disney Marvel permet de bien capter le bon rythme qui rend tous ces films usinés aussi efficaces.
Dommage alors que le long-métrage ne trouve jamais véritablement son bon filon. S’il donne beaucoup plus de présence et de matériel intéressant à la toujours lumineuse Zendaya, il se prive encore beaucoup des possibilités du personnage qu’il semble conserver pour les milles autres suites à prévoir tout dépendant du succès. Il en va de même pour les revirements scénaristiques qui reposent essentiellement sur des gags et des procédés qui se recyclent d’eux-mêmes (combien de fois peut-on mystérieusement changer l’itinéraire de ce voyage scolaire organisé?) seulement là pour mener le film où il doit aller, toute logique mis de côté ou sur des surexplications qui alourdissent ce qu’on avait déjà imaginé, mais en moins pire et problématique avouons-le.
Cette logique est par ailleurs constamment mise à l’épreuve. Certes, un des thèmes principaux de ce volet demeure la confiance et l’entreprise semble à nouveau miser sur celle aveugle que livrent les fans de Marvel à ses productions, capables de tout lui pardonner à condition d’être juste assez bien obnubilés et rassasiés. Pourtant, toute cette paresse s’avère lassante. Il faut plus que des moments « satisfaisants » et tout plein de références et de clins d’œil pour parler ici de « succès ».
Bien que plaisant, ce Spider-Man : Far From Home ne tient pas la route. C’est encore pire lorsqu’on prend en considération les deux scènes de générique (Marvel oblige) qui ne sont d’aucune cohérence une fois le choc volontaire passé. Reste alors un divertissement facile dans la trame habituelle de l’entreprise. Un film gentil, trop simple, qui veut plaire sans pour autant jamais s’assurer d’impressionner.
6/10
Spider-Man: Far From Home prend l’affiche en salles le mercredi 3 juillet.