La plupart des espèces animales les plus charismatiques de la planète – celles qui suscitent le plus d’intérêt et le plus d’empathie de la part du public – sont gravement menacées d’extinction, et ce en partie parce que bien des gens croient que leur stature ironique garantit leur survie.
Une nouvelle étude internationale publiée jeudi dans PLOS Biology porte à croire que la popularité des tigres, de lions, d’ours polaires et d’autres animaux puisse en fait contribuer à la mort d’une espèce.
Les chercheurs se sont appuyés sur un regroupement de sondages en ligne, de questionnaires distribués dans les salles de classe, de sites internet de zoos, ainsi que sur des films en dessins animés pour identifier les 10 animaux les plus charismatiques. Les trois « gagnants » sont les tigres, les lions et les éléphants, suivis des girafes, des léopards, des pandas, des guépards, des ours polaires, des loups gris et des gorilles.
« J’ai été surpris de constater que bien que ces 10 animaux sont les plus charismatiques, la principale menace pesant sur presque chacun d’entre eux est le fait d’être directement tués par les humains, particulièrement à l’aide de la chasse et du piégeage », a indiqué William Ripple, un professeur d’écologie forestière à l’Université d’État de l’Oregon, et l’un des coauteurs de l’étude.
« Ces tueries par les humains me semblent tristement ironiques, puisqu’il s’agit de certains des animaux sauvages que nous apprécions le plus. »
Plusieurs de ces animaux sont si fréquemment dépeints dans la culture populaire et dans des contenus promotionnels qu’ils pourraient constituer une « population virtuelle » trompeuse qui se porte mieux dans les contenus médias que dans la nature, souligne le principal auteur de l’étude Franck Courchamp, de l’Université de Paris.
Les scientifiques ont entre autres trouvé que le citoyen français moyen verrait davantage de lions virtuels via des photos, des dessins animés, des logos et des marques en un mois qu’il ne reste de lions sauvages vivants en Afrique de l’Ouest.
« Sans le savoir, les compagnies utilisant des girafes, des guépards ou des ours polaires à des fins de marketing pourraient activement contribuer à la fausse perception voulant que ces animaux ne risquent pas de disparaître, et n’ont donc pas besoin de mesures de protection », a ajouté M. Courchamp.
Contribuer à la protection animale
Dans leur étude, les chercheurs proposent que les compagnies utilisant l’image d’espèces menacées à des fins commerciales fournissent des informations pour promouvoir leur conservation, et peut-être une partie de leurs revenus afin de mieux protéger les espèces en question.
La protection des espèces menacées sont nombreux, mais largement disséminés. Les scientifiques ont noté que 20 millions d’Américains sont descendus dans les rues, dans les années 1970, pour manifester en faveur du premier Jour de la Terre, mais qu’il n’y a pas eu de mobilisation similaire depuis cette date.
Pour William Ripple, le concept des espèces charismatiques s’est invité dans la littérature scientifique portant sur la protection des animaux, et le public pourrait assumer que les efforts visant à assurer leur survie sont déjà en place et remportent des succès.
« Le public pourrait tenir pour acquis que nous faisons tout ce que nous pouvons pour sauver ces animaux, alors que nous ne savons même pas combien il existe d’éléphants, de gorilles ou d’ours polaires dans la nature. »