L’on a beau affirmer que l’hiver approche, il n’en reste pas moins que l’été continue de s’écouler paisiblement. Voilà pourtant que débarque l’excellent album Mareridt de l’artiste Myrkur, et qu’avec lui souffle un vent sépulcral évoquant le Nord, l’humain contre la nature, la beauté glacée de l’hiver.
Myrkur est en fait le projet solo de la compositrice et multi-instrumentaliste danoise Amalie Bruun. Responsable de la composition et de l’ensemble de l’interprétation instrumentale de ce projet musical, Bruun présente quelque chose qui pourrait tenir du mélange entre le chant contemplatif et la musique aux accents métal.
Ce qui ressemble fort à une adaptation de chants grégoriens s’y mêle ainsi à de puissantes percussions, mais aussi à des guitares électriques lourdes, envahissantes. Passant allègrement de l’anglais au danois, abordant les questions du folklore local, de la religion, de l’abandon face au plus grand que soi, quand ce n’est pas carrément une chute volontaire dans le Vide, dans le Néant… Mareridt est un voyage initiatique parmi les écueils, par-dessus et sous des flots magnifiquement dangereux.
Bien entendu, ces 11 pièces devraient évoquer des images des landes glacées du Danemark, mais impossible de ne pas remplacer ces idées floues par l’aperçu clair et net d’un Québec automnal et hivernal, ces forêts interminables où rien ne bouge, ces congères inextricables qui disparaîtront au printemps pour ensuite revenir, infatigables, en compagnie des grands froids.
Mareridt, c’est un peu l’épopée du Seigneur des Anneaux en moins épique, certes, mais en plus viscéral, une expédition quasi-impossible sur des terres inexplorées. Avec pour seule arme une détermination farouche.
On écoute volontiers l’album en boucle; les mélodies tantôt calmes, tantôt violentes ont tôt fait de nous emporter loin de l’ordinaire de la ville, du bruit des chaises à roulettes qui grincent, du bruit des doigts sur les touches du clavier.
Disque parfaitement imparfait, avec cette étrange facilité que l’on s’empresse d’accepter et de pardonner, Mareridt va d’ailleurs au-delà du premier extrait disponible en ligne, Maneblôt. On craignait un album où les hurlements l’emporteraient sur la beauté, on se retrouve plutôt avec un appel à la réflexion, un concentré de beauté et de douceur parfois doublé d’une bonne dose de rage libératrice, certes, mais toujours en conservant cet objectif à la fois noble et terrifiant: trouver notre salut sur ce territoire désolé où l’on ne trouve âme qui vive.
Qu’importe… l’odyssée est en soi salvatrice. Pour notre plus grand bonheur.
Mareridt sera disponible dès le 15 septembre.