Doug Liman ne manque pas d’ambitions et on sait que bien qu’il soit capable du pire comme du meilleur, il a une façon bien à lui d’insuffler à Hollywood un vent de fraicheur qu’on ne renie habituellement pas. Malheureusement, en voulant user de métaphores pour philosopher sur la guerre, voilà que le cinéaste nous offre l’une de ses pires propositions avec The Wall.
Déjà, oser offrir un genre de huis clos, mais à ciel ouvert, voilà qu’on brise un peu le concept. Au moins, on garde les bases semi-théâtrales de l’exercice en ne faisant usage que de trois personnages, dont un qui n’existera qu’en voix off (et caméra subjective, soit, l’une des nombreuses erreurs de mise en scène).
C’est que le film centre tout sur l’opposition entre deux soldats. Notre protagoniste, le pas très futé Isaac, soldat américain, interprété avec un manque de fougue évident par le toujours aussi désagréable Aaron Taylor-Johnson, et un sniper afghan (voix du Britannique Laith Nakli) rusé et sans pitié qui, coup de chance (?) s’avère être le seul capable d’à la fois bien parler anglais, citer Edgar Allan Poe et même imiter un accent américain! Ah oui et quelque part, histoire d’attirer le public, se trouve pas trop loin John Cena le temps de quelques secondes, avant d’être remplacé par probablement un double ou une poupée bien étendue sur le sol.
Et dans cette histoire en fin de guerre, usant un peu du contexte de Jarhead mais pour notre époque, en frôlant à peine la plus infime partie du génie de ce dernier, il serait facile de reprocher au scénario de Dwain Worrell, un habitué des séries B. Sauf qu’au-delà de son histoire de survie derrière un mur en plein milieu de nulle part, n’en déplaise à la certaine dose de stress que l’ambiance peut bien procurer, il y a beaucoup à reprocher à la mise en scène de Liman qui souligne avec beaucoup trop d’attention les invraisemblances, donnant l’impression de nous faire voir ce qu’aurait eu l’air un mauvais Buried, soit s’il n’avait pas été épaulé par la bienveillance de Rodrigo Cortés.
Ainsi, il y a beau avoir des revirements fréquents et le rythme a beau être d’à peine une heure trente, l’ennui est dans chaque recoin du projet qui ne trouve rien d’intéressant à nous apprendre sur une situation qui est devenue tellement plus complexe au fil des années et des successions politiques.
En tournoyant sur d’inutiles questionnements purement égocentriques (le film s’intéresse davantage à la survie de ses personnages plutôt qu’à approfondir ne serait-ce que la plus minime réflexion sur le quoi, le qui, le pourquoi et toutes les réelles répercussions et motivations de la guerre), le film devient rapidement redondant surtout qu’on est que bien peu intrigué par le destin de ces personnages dont on se fout royalement. Et comme si l’on pensait que ça ne pouvait pas être pire, histoire d’avoir comme tous les films de ce genre une impression de boucle et non de finalité, on nous saupoudre le tout de la finale la plus ridicule imaginable, laissant le goût déjà amer qui nous titillait, encore plus insupportable en bouche.
The Wall est donc un projet qui avait sans doute quelque part un peu de potentiel, mais son exécution est si anodine et peu supportable à visionner qu’on préféra oublier le tout et se rappeler tout le meilleur que le cinéaste aura su nous offrir par le passé en espérant qu’il nous reviendra bientôt dans une forme plus respectable. Que ce soit dans son plus intimiste (Swingers), son plus politique (Fair Game), son plus jouissif (Mr. & Mrs. Smith) jusqu’à son plus inusité (Edge of Tomorrow).
4/10
The Wall prend l’affiche en salles ce vendredi 19 mai.