Il y a plus d’une décennie, une sympathique comédie sans trop de prétention s’amusait à s’approprier le conflit anglo-franco du Québec versus le Canada pour en faire un succès qui est devenu historique dans notre filmographie. Bien des années plus tard, tout a changé et, si bien des réalités ont évolué (ou régressé, c’est selon), cette suite aussi inutile qu’insupportable semble définitivement provenir d’une autre époque.
Autant se le dire tout de suite, bien des années ont passées depuis les premières aventures et, au moins, le film le prend en compte. Toutefois, de réécouter ou non le premier volet n’y changera rien. Il est pratiquement impossible d’y retrouver quoi que ce soit de ce qu’on avait autant apprécié au premier tournant, ne serait-ce que la distribution qui revient en majeure partie dans ses meilleures et ses pires propositions. Comme Sarah-Jeanne Labrosse et Erik Knudsen qui s’avèrent toujours aussi niais dans le rôle des progénitures accessoires, alors qu’on n’ose même pas qualifier ce qu’on a le culot de faire jouer à Lucie Laurier.
Comme quoi, malgré un deuxième volet aussi dispensable de Nitro, bien qu’absurdement divertissant dans sa manière de jongler avec le risible qu’on imagine pratiquement volontaire, Alain Desrochers n’a que bien peu appris de ses erreurs. Avec surprise, il n’affiche même pas le dixième de la vision d’Erik Canuel qui fait passer ses excès de style pour du grand art à côté de la plate proposition qu’on offre ici.
Le changement de ton y est également pour quelque chose. Avec son désir d’être actuel et de toujours vouloir créer un semblant de Fast and Furious avec les moyens du bord (donc presque rien en comparaison avec nos confrères du Sud), il y a bien une histoire ridicule de bombes et quelques poursuites ici et là, mais oubliez les innombrables rires du premier film, ici, on a clairement voulu attendrir la franchise et lui donner un cœur. Vous avez bien lu, malgré quelques gags ratés et des personnages faussement hauts en couleur, on donne carrément dans le drame humain en transformant le classique buddy-cop movie en quelque chose de pratiquement existentiel dans sa réflexion sur le sens de la famille et de l’amitié (encore?).
Entièrement écrit par Patrick Huard, qui agit aussi à titre de producteur en plus de reprendre le rôle-titre, le film démontre que la complicité de l’humoriste avec Colm Feore est indéniable, mais on regrette que leur talent soit bousillé dans une succession de scènes inutiles et de quiproquos faciles et/ou vulgaires.
Probablement trop occupé avec De père en flic 2 (qu’on attend également avec une grosse brique), Louis-José Houde ne reprend pas son inoubliable rôle de coroner, et Pierre Lebeau n’est plus là non plus pour crier des insultes. Il y aussi la présence appréciée de Marc Beaupré, qui doit malheureusement composer avec un rôle qui donne l’impression d’être une relecture de son personnage culte qu’est Marc Arcand de Série Noire, mais par quelqu’un qui n’a tout simplement pas compris le personnage et aurait seulement voulu en garder les éléments les plus faciles. On doit plutôt se farcir l’insupportable Mariana Mazza avec un rôle qui fait fortement travailler la tolérance et ramène au niveau d’humour avec lequel on doit faire affaire pour ce qu’on croyait être une comédie.
De plus, en dépassant les deux heures, allongeant toujours plus l’inutile au non agréable, le film finit par ne plus savoir où donner de la tête et, en arrive à vouloir allonger ses horizons dans une idée ambitieuse, valable même, mais totalement ratée et, surtout, mal exécutée. Ayant déterminé qu’on avait fait le tour de la question anglo-franco pour le Québec, on décide de l’aborder par le biais des États-Unis pour rire de nos voisins. Seulement, avec ses allures de Corner Gas, les passages qui s’y rattachent semblent aussi bons qu’un mauvais film canadien-anglais. Donc décidément pas très bon.
C’est là alors qu’avec un premier long-métrage qui a autant séduit et marqué le Québec, qu’inconsciemment, ce deuxième film a peut-être voulu davantage plaire au côté anglo du Canada. Bien qu’on a essayé diviser les dialogues équitablement entre le français et l’anglais, histoire oblige, l’anglais semble définitivement l’emporter… ce qui d’une certaine façon ne touchera vraiment pas le public québécois de la même manière que le premier film y était parvenu.
Bon Cop Bad Cop 2 est donc tout un ratage. Une proposition incohérente à bien des niveaux qui, même si une part de l’équipe revient, ne semble plus être en mesure de raviver ne serait-ce qu’une infime partie de l’essence du succès du premier film. Le genre d’opportunité de rentabilité qu’on ne voudrait définitivement pas faire subir à personne. Vous aurez été prévenus.
2/10
Bon Cop Bad Cop 2 prend l’affiche en salles ce vendredi 12 mai.