La maison comme un refuge… Et le théâtre comme un événement audio? Sur les planches du Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, Transistor Média, en coproduction avec le Théâtre français du Centre national des Arts, propose Là où la poussière se dépose, un regard différent sur le fait d’habiter nos réalités.
Habiter nos réalités, en effet. Car le domicile, pour bien des gens, n’est pas un simple endroit où dormir; il est un lieu où vivre, où bâtir un chez-soi, où faire grandir son existence, voire celle des membres de sa famille.
Voilà pourquoi Julien Morissette et Karina Pawlikowski proposent cette plongée dans l’ordinaire, ce voyage dans le banal, le commun; cette entrée dans nos domiciles. Des domiciles transformés, transposés, déracinés à l’occasion d’un déménagement, d’un divorce, ou de tout autre événement qui nous force à revoir notre existence, à la transporter ailleurs.
Et pour sortir des sentiers battus, le public du CTDA a non pas droit à une pièce de théâtre classique, mais plutôt à un genre d’hybride entre l’art de la scène et celui du balado. Les comédiens, accompagnés de M. Morissette, qui est à la tête de Transistor Média, une compagnie de production et de diffusion de contenus audio, vont ainsi défiler devant une série de micros répartis un peu partout dans l’espace de jeu. Tour à tour, ils présenteront des extraits de texte, des témoignages, des déclarations portant sur le concept de maison, de refuge.
À la fois morceaux de fiction et séquences que l’on imagine être authentiques, cette série de moments sonores vise à évoquer autant d’images dans nos têtes. Autant d’univers trouvant leur existence et leur mort entre quatre murs. Comme si la vie disparaissait à l’extérieur. Du moins, en partie.
Sur scène, trois très bons comédiens: Émilie Bibeau, Célia Gouin-Arsenault et Emmanuel Schwartz. Tous trois avec de superbes voix, capables de proposer des émotions et de la profondeur, même pour des choses en apparence aussi ordinaires que le fait de remonter une horloge grand-père.
Là où la chose s’essouffle, c’est que Là où la poussière se dépose est davantage un podcast qu’une pièce de théâtre. Bien entendu, nous avons des comédiens, nous avons une scène, nous avons des textes, mais tout cela semble avoir été conçu pour les auditeurs, plutôt que pour les gens installés dans les gradins du CTDA. Sans véritable occupation de l’espace scénique, sans l’aspect visuel et physique qui accompagne habituellement une oeuvre théâtrale, la définition de celle-ci tient-elle toujours la route? N’aurions-nous pas gagné, en effet, à écouter simplement la version audio?
S’appuyant sur de bonnes bases, et avec quelques très bons moments – sans compter d’excellents interprètes –, Là où la poussière se dépose souffre malheureusement de deux tares. Non seulement l’expérience théâtrale est-elle phagocytée par l’importance accordée à la version audio de l’oeuvre, mais il faut aussi admettre que ce ne sont pas tous ces « moments » qui font mouche. C’est bien dommage…
Là où la poussière se dépose, de Julien Morissette et Karina Paklikowski; avec Émilie Bibeau, Célia Gouin-Arsenault et Emmanuel Schwartz
Au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui jusqu’au 12 octobre