Développé par Starward Industries et publié par 11 bit studios, The Invincible, un jeu narratif se déroulant dans un univers de science-fiction rétro, cherche par tous les moyens à vous assurer qu’il met de l’avant un dilemme philosophique de grande importance. Dans son désir de conclure son argumentaire, cependant, le titre sacrifie à peu près tout, à l’exception des visuels.
Sur la planète Regis III, l’astrobiologiste Yasna se retrouve séparée de ses collègues, qui forment ensemble une petite équipe de chercheurs rattachés au Commonwealth. Désireuse de retrouver les autres membres de l’équipage, notre héros se rendra rapidement compte que quelque chose ne tourne pas rond sur ce monde. À l’instar d’un autre jeu narratif similaire, l’excellent Firewatch, The Invincible va tenter de créer un lien affectif entre Yasna et le commandant de la mission, ce dernier étant demeuré en orbite.
Pendant une très grande partie du jeu, d’ailleurs, il s’agira de la seule personne avec qui nous serons en contact; à la surface de ce monde extraterrestre, tout est désertique; les quelques humains que l’on y trouve, qu’il s’agisse de nos collègues ou des membres de l’Alliance, qui est l’ennemie du Commonwealth, sont très largement soit privés de leurs fonctions cognitives supérieures, soit morts.
Regis III est donc une véritable planète extraterrestre, dans le sens étrange du terme: pas de sympathiques habitants peu évolués, ici, ou de vastes prairies vertes; non, tout est mort, stérile. Et qu’en est-il de ces étranges structures en métal qui ne semblent pas être d’origine humaine?
Et à travers les huit heures que durera cette aventure, le jeu posera toujours la même question: que faisons-nous là? L’humanité a-t-elle vraiment besoin d’explorer la galaxie? Dans quel but? Et pourquoi transposons-nous nos conflits millénaires parmi les étoiles?

De la vision… à l’exécution
Tout cela est bien beau, même si cela n’est pas excessivement original, mais les développeurs de The Invincible ne semblent pas avoir trouvé de méthode efficace pour transposer leurs questionnements – ou plutôt, sans doute, ceux du roman du même nom dont ils se sont inspirés pour créer leur jeu – sous la forme de mécaniques intéressantes.
On est plutôt condamnés, malheureusement, à participer à un walking simulator pratiquement dénué d’intérêt. Firewatch, mentionné plus haut, s’articulait autour de la relation entre le héros et cette voix féminine qui le guidait tous les jours dans son métier de garde forestier chargé de détecter les feux. Ici, les échanges entre Yasna et son commandant sont très largement professionnelles, froides, ou encore distantes.
Quant aux interactions avec l’environnement, elles sont minimales: on tournera une clé ici, on appuiera sur un bouton là… Mais autrement, il suffit de suivre le chemin tout tracé pour nous, sans possibilité d’explorer ou de s’éloigner des sentiers battus. Pire encore, les dialogues sont parfois si longs que si l’on continue de progresser, en marchant à une vitesse qui est déjà ridiculement basse, on finira régulièrement par « sauter » des dialogues en déclenchant de nouveaux échanges.
Ajoutez à cela une multiplication des séquences où nous n’avons aucun contrôle sur notre personnage, et vous obtenez une expérience à peu près aussi interactive qu’un film… en beaucoup plus frustrant, puisqu’on nous propose un jeu vidéo d’aventure et d’exploration, ce qui signifie, généralement, le fait de contrôler les faits et gestes d’un personnage.
Rare point positif, The Invincible s’appuie sur un style rétro pour l’ensemble de ses équipements de science-fiction: des commandes au mobilier, en passant par les combinaisons, les robots, les vaisseaux spatiaux, voire les cigarettes que fument nos explorateurs de l’espace, tout évoque la passion pour l’espace des années 1950. Une grande réussite qui est beaucoup plus intéressante que l’équipement souvent sans âme des oeuvres contemporaines de science-fiction.
Malgré cette réussite visuelle, The Invincible est un jeu qui frustre à un point tel que l’on envisagera à plusieurs reprises de tout laisser tomber. On peut voir le potentiel particulièrement mal exploité, et cela ne fait qu’empirer les choses. Un jeu à oublier.
The Invincible
Développeur: Starward Industries
Éditeur: 11 bit studios
Plateformes: PlayStation 5, Xbox Series, Windowes (testé sur Windows/Steam)
Jeu disponible en français (interface et sous-titres)