L’analyse de plus d’un million d’images satellites a révélé que quelque 4000 kilomètres de terres humides côtières ont disparu depuis une vingtaine d’année, à l’échelle mondiale.
La crise climatique et les activités humaines entraînent des changements rapides dans ces zones, soit des marais côtiers, des mangroves et des vasières. Cependant, des processus de restauration des écosystèmes et divers procédés naturels permettent de réduire l’ampleur des pertes.
Malgré tout, des tentatives pour estimer l’état actuel et futur de ces zones demeurent imprécises en raison de l’incertitude à propos de la façon dont ces terres humides côtières réagissent aux facteurs de changements.
Dans le cadre d’une nouvelle étude, des chercheurs ont mis au point une analyse fonctionnant à l’aide de l’apprentissage machine qui permet de passer au crible de vastes archives de photos satellites pour détecter l’ampleur des changements survenus entre 1999 et 2019, ainsi que l’élément déclencheur et le type de transformations.
Ces chercheurs ont constaté qu’à l’échelle planétaire, 13 700 kilomètres de terres humides côtières ont disparu, contre la création ou la restauration de 9700 kilomètres carrés de ce même type de terres, ce qui représente une perte nette de 4000 kilomètres pendant cette période de 20 ans.
Les travaux sont publiés dans Science.
« Nous avons constaté que 27 % des gains et des pertes étaient directement associés à l’activité humaine, comme la conversion des terres pour l’agriculture et la restauration des zones perdues », mentionne le Dr Nichaolas Murray, principal auteur de l’étude.
Tous les autres changements ont été attribués à des facteurs indirects, comme les impacts humains sur les zones de chalandise, le développement d’importance dans les zones côtières, l’affaissement côtier, les processus naturels qui surviennent dans ces zones et les changements climatiques.
L’Asie, le coeur du problème
Environ les trois quarts du déclin des zones humides côtières s’est produit en Asie, avec près de 70 % des pertes concentrées en Indonésie, en Chine et au Myanmar.
« L’Asie est le point central de la perte des terres côtières humides en raison de l’activité humaine. Ces activités ont eu un rôle moindre dans les disparitions recensées en Europe, en Afrique, dans les Amériques et en Océanie, où ce sont plutôt les facteurs indirects, comme la migration des terres humides, les modifications côtières et les changements en matière de chalandage qui ont eu l’impact le plus élevé », a indiqué le Dr Murray.
Les chercheurs ont par ailleurs constaté que près des trois quarts des pertes de terres humides côtières ont été compensées par la création de nouvelles zones dans des endroits où l’on n’en trouvait pas auparavant, notamment dans les deltas du Gange et du fleuve Amazone.
La plupart des nouvelles zones de terres côtières humides découlent de l’action de facteurs indirects, ce qui souligne le rôle joué par des processus à grande échelle dans le maintien de ces zones, ainsi que pour faciliter leur régénération.
« Ces résultats indiquent que nous devons faciliter le mouvement et la migration des terres humides côtières pour compenser les changements mondiaux de grande ampleur », a souligné le Dr Murray.
Toujours selon lui, « il est essentiel d’établir des processus de surveillance à l’échelle mondiale si nous voulons gérer les changements des environnements côtiers de manière efficace ».
Plus d’un milliard de personnes vivent dans des zones côtières à faible élévation par rapport au niveau de la mer; de plus, les zones humides côtières sont liées à quantités d’avantages essentiels pour l’humanité, comme le stockage et la séquestration de carbone, la protection des côtes, ainsi que l’amélioration des zones de pêche.
« La protection des zones humides côtières est essentielle pour soutenir les communautés côtières et la santé de la planète en général. Ce sont aussi les derniers refuges pour plusieurs plantes et animaux », soutient pour sa part le Dr Thomas Worthington, coauteur de l’étude.
« Ces données peuvent aider à identifier les zones côtières les plus touchées, et donc celles qui ont besoin de protection, ou encore les endroits où nous pouvons prioriser la restauration. »