Fascinante histoire que ces Éthiopiens ayant conservé, pendant des millénaires, des traditions juives remontant à l’Antiquité. Dans le cadre du festival Vues d’Afrique, le documentaire Yerusalem raconte justement la saga de ces juifs des temps anciens qui rêvent de la terre promise depuis belle lurette.
Réalisé par Mlevi Zini, le film rassemble quantité d’images d’archives de ce peuple perdu au fin fond de la brousse, et qui souhaitait plus que tout revenir à Jérusalem, en quelque sorte le paradis fait ville. Entretemps, les voilà qui sont ostracisés à travers les siècles, opprimés, condamnés à vivre dans la misère, quand ils ne sont pas carrément ciblés par les autorités et victimes de pogroms.
Mais ce peuple fut justement éventuellement découvert par la communauté internationale, et plus spécifiquement, par les juifs en Israël, alors une nation encore particulièrement jeune, et où l’on encourageait la diaspora à revenir pour s’y installer.
De là, on aurait pu croire que les juifs éthiopiens, très lointains descendants des habitants d’Israël, seraient accueillis à bras ouverts; et pourtant! Outre les considérations géopolitiques de l’époque, avec les guerres d’influence entre l’Est et l’Ouest en Afrique, du temps de la guerre froide, les nécessités logistiques – comment transporte-t-on plus de 20 000 personnes, y compris des femmes et des enfants? – viennent compliquer les choses.
Pire encore, certaines autorités religieuses israéliennes vont jusqu’à estimer que ces Éthiopiens ne peuvent être juifs, puisqu’ils… sont noirs. Comme quoi ce n’est pas parce que l’on vient d’échapper à l’Holocauste que l’on ne peut pas faire preuve de racisme à notre tour, semble-t-il.
Fort heureusement, le bon sens a prévalu au sein du gouvernement israélien, qui a mené plusieurs opérations, au fil des ans, pour transporter ces gens qui vivaient alors bien souvent dans des camps de réfugiés.
Aujourd’hui, cela fait 40 ans que les juifs éthiopiens vivent parmi les autres Israéliens. Certains sont devenus des professeurs; d’autres des députés, des médecins, des penseurs. Tous sont toutefois encore marqués par la façon dont ils ont été traités à leur arrivée en terre sainte, avec de la discrimination, de l’ostracisme, du racisme cru et cruel. Aujourd’hui encore, ils sont souvent des citoyens de seconde zone.
Ce que Yerusalem démontre, en fait, que la quête de la terre promise, de cette cité dans les nuages, est la quête d’un monde idéal qui n’existe malheureusement pas. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas tenter de l’inventer…