Que faire, devant l’incompréhensible? Comment réagir face à l’horreur, mais surtout comment s’adapter à la vie d’après? Armé d’un budget de moins de 300 000 $, Fran Kanz signe Mass, un drame extrêmement intime qui se déroulera quasiment à huis clos. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’exercice est réussi haut la main.
Deux couples doivent se rencontrer dans une petite église, presque une église de campagne. Pourquoi? Les cinéphiles l’ignorent, du moins pour l’instant. Tout ce que l’on sait, c’est que la rencontre est importante, et qu’elle n’augure rien de bon. La tension est presque à couper au couteau, et le fait que Kanz, qui est ici à la fois scénariste, réalisateur et producteur, dans le cadre de son premier long-métrage, fait durer le suspense.
Il faut dire que l’homme a l’habitude des jeux d’esprit. On l’a notamment vu dans l’excellent The Cabin in the Woods, où il jouait Marty, celui qui parvenait à découvrir les infâmes machinations des gens chargés d’organiser les sacrifices humains. On le trouve ici en pleine possession de ses moyens, et surtout en mesure de produire un drame sans avoir besoin de trop expliquer les choses.
Mieux encore – et sans trop en dévoiler sur le contenu du scénario, même si l’on peut rapidement deviner les tenants et les aboutissants du script –, Kanz est capable de combiner réalisation technique et développements scénaristiques pour faire progresser l’intrigue. Ce qui n’est certainement pas donné à tout le monde, malheureusement. À mesure que nos deux couples passent des pleurs à la rage dans le cadre de leur discussion, voilà que la caméra, autrement particulièrement statique, s’anime. Cette même caméra ira même jusqu’à pratiquement sautiller, voire bondir, en passant d’un interlocuteur à un autre, au fil de l’action.
Côté jeu, le public est servi: Jason Isaacs, Martha Plimpton, Reed Birney et Ann Dowd sont tour à tour des parents éplorés, des époux compatissants, et des adultes désemparés face au drame quasi cataclysmique qui les a poussés à se retrouver dans cette salle, tous autour d’une table. Pendant près de deux heures, les voilà qui tempêtent, pleurent, hurlent, débattent du sens de l’existence… bref, apprennent à vivre avec leur douleur. Et, surtout, tentent de comprendre ce qui demeurera toujours un peu incompréhensible.
Simple, direct, plus qu’efficace, Mass évite le superflu et l’hyperbole pour se concentrer sur ce qui compte réellement. Et c’est tant mieux, puisque le film mérite amplement tous les prix qu’il a remportés dans divers festivals. Un petit bijou de long-métrage indépendant méconnu.