Il a beau avoir réalisé d’autres films, notamment le très réussi Baby Driver, le réalisateur Edgar Wright est encore très largement connu pour sa trilogie du Cornetto, les trois comédies mettant en vedette Nick Frost et Simon Pegg. De voir M. Wright donner dans l’horreur et la critique sociale, dans Last Night in Soho, peut surprendre, mais le cinéaste se montre heureusement à la hauteur des attentes.
Fascinée par le monde londonien de la mode, mais rebutée par un univers urbain auquel elle ne connaît pas grand-chose, si ce n’est que sa mère y a trouvé la mort il y a de nombreuses années, Eloise Turner s’installe dans la capitale britannique pour y suivre des cours de conception de vêtements.
La jeune femme (jouée par l’actrice néo-zélandaise Thomasin McKenzie, bien efficace) découvrira bientôt qu’elle est transportée, chaque soir, dans le Soho des années 1960, l’époque des cabarets, des tenues de soirée chics à souhait, et du glamour. Dans la peau de la jeune Sandie (Anya Taylor-Joy), Eloise explore un monde séduisant, mais qui cache une vérité aussi sombre que terrifiante.
Bien vite, en effet, Sandie doit se rendre à l’évidence: on lui avait promis fortune et gloire, la voilà qui se retrouve à d’abord « accompagner » certains clients masculins du club, puis à jouer la prostituée pour son maquereau, Jack, un homme enjôleur, mais qui peut aussi s’avérer particulièrement violent.
Confrontée à tout cela, Eloise commence à craquer. D’autant plus que les hallucinations ne sont pas confinées à ses rêves, mais empiètent toujours un peu plus sur sa propre réalité de jeune femme sans véritables amis, et qui subit les moqueries de ses collègues de classe.
On est ici bien loin de Hot Fuzz, mais Wright respecte sans coup férir ses propres codes, en puisant allègrement dans les visuels, les vêtements et la musique des sixties. Ajoutez à cela les plans serrés, mais toujours efficaces, auxquels le cinéaste nous a habitués, et vous obtenez un film où les séquences d’action sont généralement exécutées de main de maître. Les allers et retours entre les personnages d’Eloise et de Sandie, souvent à l’aide de trucages impliquant des miroirs, sont particulièrement réussis.
Côté scénario, toutefois, si bien des choses sont expliquées en fin de film, Last Night in Soho laissera l’impression d’une oeuvre un peu vide, qui se contente surtout de présenter de jolies robes, de la bonne musique des années 1960, et Anya Taylor-Joy en train de danser, plutôt que d’offrir une structure scénaristique plus complète. Rien pour vraiment gâcher l’expérience, certes. Mais nous sommes bien loin du rythme et de l’efficacité des trois oeuvres classiques du réalisateur…